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l'Association Agir pour Fayence: un indéniable succès

 

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L'association Agir pour Fayence organisait hier 28 mars 2019 sa deuxième réunion dans la salle de la Renaissance sur le thème "Ruralité et Urbanisation".

Ce fut un indéniable succès comme le témoigne la nombreuse assistance - une salle trop petite, la présence de nombreuses associations citoyennes du pays de Fayence, la pertinence  des propos des deux intervenants - Patrick de Clarens président du syndicat des agriculteurs du pays de Fayence et Alexandre Zago avocat spécialiste des questions d'urbanisme, ainsi que les questions et réponses qui suivirent leurs exposés.

Voici la thématique proposée: Comment concilier ruralité et urbanisme.

J'ai trouvé intéressant l'exposé de Patrick de Clarens sur l'histoire de l'agriculture en pays de Fayence. Voici ce que j'en ai retenu. Je résume. 

Durant tout le 19è siècle l'agriculture  fut une agriculture de subsistance plus quelques fleurs à parfums en interdépendance avec le territoire de Grasse le plus proche. Production de blé et de de céréales et de vin dans les parties les plus fertiles; production de courges, pois chiches, fèves, pommes de terre, haricots , olives... dans les parties les plus arides.. et des fleurs à parfums pour les parfumeries de Grasse. L'élevage était aussi la 2è composante de l'agriculture locale.

Mais le manque d'eau, la géologie et la topographie pentue des terres, ainsi que la pauvreté des sols, n'étaient guère favorables à une production agricole suffisamment rentable pour les paysans et pour permettre une croissance de la population. La population de Fayence était de 2792 habitants en 1821, à la fin des guerres napoléoniennes.  Elle n'a  pas cessé de décliner durant tout le 19è siècle et elle n'était que de 1400 habitants en 1911, à la veille de la première guerre mondiale; la première révolution industrielle n'a donc guère profité à Fayence.

Après la guerre 1914-1918, la population était tombée à 1119 habitants en 1921.  Durant toute la période 1920-1940 l'agriculture et la population stagnèrent à environ 1250 habitants. Ce n'est après la 2è guerre mondiale, avec les aides du plan Marshall, et surtout à partir de 1960 avec la prospérité des trente glorieuses, que la population a commencé à croître rapidement pour atteindre plus de 6000 habitants d'aujourd'hui. Mais cette évolution est due à la vente de terres par les propriétaires (agricoles) aux nouveaux venus, gens de la ville riches et prêts à payer des prix élevés. C'est une évolution qui a affecté en même temps toute la Côte d'Azur de Menton à Mandelieu, et la Côte Varoise d'Agay à Toulon.

Ne parvenant pas à vivre décemment comme les autres de leurs activités agricoles, beaucoup de propriétaires  se sont mis à vendre des terrains aux acheteurs désireux de s'installer dans l'arrière pays de la Côte d'Azur, parce que moins chers que  sur le bord de mer. Les municipalités favorisaient le mouvement qu'elles considéraient comme une aubaine, vu les conditions de croissance économique partout, en accordant à tout va des permis de construire. Il en est résulté un mitage de tout le paysage. 

C'est ce mouvement que les nouvelles lois de l'urbanisme ont voulu arrêter en réformant le code de l'urbanisme:  l'obligation pour les communes d'élaborer des plans locaux d'urbanisme, des schémas de cohérence territoriale, et plus récemment les intercommunalités et  la loi Alur...  Densifier l'existant et les zones proches des centres urbains plutôt que continuer l'étalement en zones naturelles, forestières  et à potentiel agricole. L'élaboration des PLU et des SCOT a ainsi amené les communes à redéfinir les espaces en naturels N, agricoles A,  urbanisés U et "à urbaniser" AU.

Alors, Agriculture et urbanisme sont ils en concurrence?

786ffdf0b94bb07810ec24f7a892dfa9.jpgL'idée d'une concurrence entre l'agriculture et l'urbanisation s'est installée dans les esprits dans les années 2000,  avec la notion d'économie résidentielle.  Comme si l’économie résidentielle - les communes dortoirs - serait parasitaire pour l'économie  productive  et l'économie présentielle c'est à dire les habitants indigènes cad. de souche plus ancienne. Voici ce que dit Magali Talandier sur ce sujet "La question posée est de savoir si cette opposition entre économie et territoires productifs et économie et territoires résidentiels, ne reflèterait pas  des systèmes territoriaux productivo-résidentiels intégrant les différentes fonctions territoriales (production, logement, équipements, municipalités,  associations,  loisirs, tourisme, retraite, ...). Ce seraient moins les oppositions que les interactions, les interdépendances  entre les territoires, qui caractériseraient le fonctionnement en "système" de notre territoire. Voir cette étude de Magali Talandier.

Une autre évolution est présente aujourd'hui en matière  agricole. Le retour de l'intérêt de la forêt en raison de la filière bois énergie, en plus de l'usage traditionnel du bois bûche. Il s'agit de son développement par les chaufferies bois, et les granulés et poëles à bois, de la transition énergétique et de la production d'électricité à la centrale biomasse de Brigoles Nicopolis. Du coup les forêts de notre territoire redeviennent des sources de valeur économique. Il s'agit principalement des pins d'alep qui sont une espèce pionnière dans la reforestation naturelle. Il faut des siècles pour qu'une forêt défrichée pour l'agriculture redevienne forêt et ça commence par les pins. Le problème ici est de rassembler tous les propriétaires  pour exploiter leurs surfaces - 75% des surfaces sont propriétés privées et les propriétaires sont dispersés, au fur et à mesure des divisions des héritages à travers le temps depuis des lustres.

Il en est de même des surfaces agricoles en friche.

La superficie de Fayence c'est 27890 hectares sur les 40900 ha de l'ensemble du pays de Fayence, Bagnols compris. 4300ha. Donc 36600ha hors Bagnols 366km2 dont je dispose de données.  Sur cette surface de 366km2,  80% est du bois et de la forêt, 5% des espaces artificialisés et 15% des espaces agricoles (cf.source Corine landcover 2006) . La surface agricole utilisée est de 3000 ha et on recense 500ha en friche cad. abandonnés. Mais là, le problème est aussi de toucher les propriétaires, le plus souvent hors du pays de Fayence, en indivision et de les amener à vendre et à quel prix. Il n'y a pas de marché offres/demandes pour cela. Sauf si la collectivité propose de racheter des terrains en utilisant les matrices cadastrales et ensuite de les vendre à de jeunes agriculteurs demandeurs. Jeunes agriculteurs formés en quête de terrains?  Il faut donc créer un marché. C'est ce que la Communauté de Communes doit faire si elle veut effectivement faire renaître l'agriculture, la forêt et le sylvo pastoralisme et l'inscrire dans le dynamisme interactif des .3 fonctions.

Revenir à l'autarcie et à l'autonomie alimentaire du 19è siècle? Et le changement climatique dans tout ça?

La pensée collective est bien là sur ce point.  Bio, circuits courts, autonomie alimentaire, perma culture, aquaponie, etc... Mais est-ce possible? Sauf effondrement civilisationnel majeur et disparition de l'espèce humaine? ne sommes nous pas l'espèce la plus nuisible de la planète?  Nos 7.5 milliards d'individus, le changement climatique, la disparition des autres espèces et de la biodiversité .... sont le  résultat de notre formidable expansion exponentielle due à notre cerveau et à notre capacité de coopérer par le langage net l'action collective, bref notre évolution culturelle s'ajoutant à notre évolution génétique. Mais toute croissance exponentielle se termine un jour ou l'autre, en général par une crise,  voire un effondrement. 

Nous sommes en interdépendance avec toutes les régions, celles les plus proches - Grasse, Mandelieu, Antibes Saint Raphaël, Fréjus, Puget, Roquebrune, Draguignan...comme celle du monde entier,  où les trois formes d'économie - productive, résidentielle et présentielle - coexistent en interaction permanente.  Tout territoire ne peut produire et utiliser strictement et localement, que ce qu'il a grâce à ses ressources naturelles.  Pour avoir plus, il faut nécessairement échanger entre territoires.

Conclusion:

L'Association Agir pour Fayence lancée par Marco Orfeo est un indéniable succès; retrouver le contrôle local de notre destin fait partie de son projet. Ecoutons nous, tous les uns les autres, écoutons toutes les associations citoyennes, qu'elles soient de réflexion, de préservation du patrimoine ou culturelles.... c'est ça la vraie démocratie. Mais je termine en citant Winston Churchill; je ne sais s'il l'a dit exactement comme cela: "la vie c'est aller d'erreur en erreur sans jamais se décourager à continuer jusqu'à la fin". C'est en tout cas, comme cela que j'ai vécu.

Pour en savoir plus:

 

  1. Fayence par wikipedia
  2. Agriculture en pays de Fayence
  3. Billets du blog pays de Fayence sur l'Agriculture
  4. Agriculture en pays de Fayence Christian Louis conseiller communautaire
  5. Tout sur le SCOT Schéma Cohérent d'Organisation Territoriale
  6. Contribution du syndicat des agriculteurs à l'élaboration du SCOT