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Pourquoi votre salaire n'augmente pas comme il devrait ? | Contrepoints
Kevan Saab

 

En France, une bonne partie de la classe politique se plaît à répéter depuis plusieurs décennies son désamour pour les « riches » tout en clamant haut et fort œuvrer dans l’intérêt des « pauvres » et de la « classe moyenne ». Chaque année, l’INSEE nous donne un aperçu des résultats des politiques publiques menées par ces mêmes chantres des classes populaires sous la forme d’une étude statistique sur la distribution des revenus salariaux et des allocations chômage par décile.
Qui sont les riches ? Qui sont les pauvres ?

Bien qu’il n’existe aucune définition officielle des critères qui font de vous un « riche », un « pauvre » ou encore un Français de « classe moyenne », on s’accordera pour considérer les 20% obtenant les revenus les plus importants comme étant nos riches, les 20% obtenant les revenus les moins importants comme étant nos pauvres et enfin les 60% des français se trouvant en sandwich entre ces deux groupes comme étant notre fameuse classe moyenne.

En se basant sur les chiffres de l’INSEE les plus récents, ceux pour l’année 2014, on obtient les revenus suivants pour nos catégories :

Pour les 20% les plus pauvres, les revenus s’échelonnent de 0 à 9 910 euros avec une médiane de 5 020 euros par an
Pour les 60% du milieu qui constitue notre classe moyenne, les revenus s’échelonnent de 9 911 à 29 200 euros avec une médiane de 19 030 euros
Pour les 20% les plus riches, les revenus sont supérieurs à 29 201 euros avec une médiane à 37 670 euros

À la simple lecture de ces chiffres, quelques constats s’imposent. Tout d’abord, on note que 20% des individus vivent avec moins de 825 euros par mois, soit à peine un peu plus de la moitié du SMIC. Un chiffre consternant pour un pays du G8. En ce qui concerne notre classe moyenne, l’individu médian affiche un revenu mensuel de de 1 585 euros par mois, soit plus ou moins le SMIC. Plus inquiétant encore, les membres les plus aisés de notre classe moyenne n’émargent qu’à 2 433 euros par mois, soit environ 1,6 fois le SMIC. Bref, pour faire simple, 80% des individus ont des revenus salariaux et des allocations chômage compris entre 0 euros et 1,6 fois le SMIC.
Le poids du coût du travail

Cette situation est ni plus ni moins la conséquence de la politique économique en matière de coût du travail qui a consisté à tabasser de charges sociales les postes rémunérés au-dessus du seuil fatidique de 1,6 fois le SMIC (les abattements de charges dit « Fillon » concernent les salaires inférieurs à 1,6 fois le SMIC). Enfin, en ce qui concerne les riches, l’entrée au palmarès se fait à partir de seulement 2 433 euros par mois. Une somme très modeste pour un pays développé.

Comme le montre le graphique ci-dessus, une fois l’inflation exclue du calcul, les courbes historiques des revenus de toutes les catégories sont désespérément plates. Pour faire simple, les revenus salariaux réels ont stagné pour l’ensemble des Français, peu importe leur niveau de salaire, pour les douze années pour lesquelles l’INSEE fournit des données.
Les conséquences du cynisme politique

Contrairement à ce qu’affirment certains, les riches n’ont pas connu d’augmentations salariales vertigineuses, mais une maigrichonne augmentation de 3,5% sur 12 ans. Autre constat, les plus pauvres que l’ensemble de la classe politique affirme à l’unisson placer au centre de leur politique économique sont de loin les moins bien lotis. A-t-on affaire à un cynisme éhonté, à une incompétence manifeste ou à un mélange des deux ?

Évidemment, un tel bilan catastrophique n’est guère surprenant pour qui s’intéresse aux performances économiques françaises. En effet, impossible de faire des miracles avec une croissance atone et un chômage de masse, l’augmentation des salaires étant liée à l’augmentation de la productivité des travailleurs.

Ainsi, selon Eurostat, le PIB par habitant français n’a progressé que de 5,4% en termes réels entre 2002 et 2014, un chiffre qui corrobore l’augmentation du revenu salarial médian fourni par l’INSEE. Pour faire simple, les salaires français stagnent parce que la production de richesse par habitant stagne elle aussi.
Conclusion

L’étude des données économiques ne laisse nulle place au doute : le salarié lambda a vu ses revenus quasiment stagner depuis le début des années 2000. Pire, près de 80% des individus ont aujourd’hui un revenu mensuel inférieur à 1,6 fois le SMIC, un chiffre qui explique presque à lui seul le manque de pouvoir d’achat ressenti par la plupart des ménages. Dure réalité pour un pays qui souhaite continuer à être une puissance économique majeure.

En réalité, les défenseurs du modèle social français – dont on dit que le monde entier nous envie, mais que personne ne semble imiter – ont tenu leur promesse de réduire drastiquement l’écart moyen entre les pauvres et les riches. L’ennui c’est que cette égalité célébrée partout s’est fait en rendant tout le monde pauvre, une ironie cinglante pour ceux qui soutinrent ces politiques en expliquant combattre la pauvreté.

 

Source: contrepoints.org Par Kevan Saab.