JustPaste.it

France Stratégie: La FRANCE dans 10 ans: CHAPITRE 6 UNE DÉMOCRATIE DE LA CONFIANCE



Il ne va pas de soi qu’il faille donner une réponse politique à des dysfonctionnements économiques, à des souffrances sociales et à un malaise de la société. L’anémie de la croissance et le niveau élevé du chômage semblent d’abord appeler des réponses directes, au point que certains pourraient considérer tout investissement dans des réformes institutionnelles comme une sorte de distraction à l’égard des priorités essentielles. De la même manière, les tiraillements du vivre ensemble semblent d’abord relever de réponses à la seule hauteur des incidents qui émaillent l’actualité et sollicitent régulièrement les esprits – même si la réalité tend à montrer que ces réponses, pour nécessaires qu’elles puissent être, échouent à calmer les antagonismes et à atténuer les frustrations.

Ignorer la dimension politique de la crise que nous traversons serait cependant une erreur. La France est tiraillée par le doute et les forces centrifuges, il est primordial de ressouder son unité sur les valeurs qui fondent son pacte républicain et de retrouver confiance dans les institutions politiques qui forment l’armature de sa démocratie.


En décembre 2013, plus des deux tiers des Français (69 %) considéraient qu’« en France, la démocratie ne fonctionne pas très bien ou pas bien du tout »1. Or nos concitoyens ne peuvent accepter de s’engager dans un effort d’ampleur que s’ils sont assurés de la qualité des processus de décision qui guident les choix publics et s’ils ont confiance dans la capacité du système politique à arbitrer avec équité entre des intérêts antagoniques. Ils ne peuvent envisager sans crainte l’accroissement de la variété des choix individuels, des références et des modes de vie que s’ils savent que les institutions politiques et sociales seront néanmoins en mesure de dégager le bien commun. Ces deux conditions font aujourd’hui défaut.


C’est donc bien à une réforme de notre démocratie qu’il nous faut aujourd’hui procéder pour renouer les fils de notre confiance dans l’avenir en réhabilitant le politique. Trois leviers d’action doivent être mobilisés à cette fin :

  1. celui des institutions, dans le but de revivifier la démocratie représentative, en permettant un renouvellement des élites, en simplifiant la structure de l’exécutif et en clarifiant fortement l’articulation entre la loi et le règlement ;
  2. celui de l’organisation des pouvoirs, à tous les échelons, afin qu’ils soient plus responsables et plus transparents, ce qui implique en particulier une vigoureuse reconfiguration de la carte et des strates de notre démocratie locale ;
  3. celui de la société civile, avec une meilleure articulation entre la loi et la démocratie sociale, la promotion de l’engagement citoyen, au travers de l’essor des pratiques participatives et d’une meilleure reconnaissance de l’engagement bénévole et associatif.

 

Réconcilier les citoyens avec leur démocratie



Les Français restent profondément attachés à la démocratie représentative, et ils tiennent le vote pour le meilleur moyen de se faire entendre et de participer aux décisions. Dans le même temps, ils expriment une désaffection croissante à l’égard des élus et des gouvernants. Pour résoudre ce paradoxe et réconcilier les citoyens avec leur démocratie, des mutations d’ampleur, trop longtemps retardées, doivent être menées à bien.



             Mettre en œuvre l’interdiction du cumul des mandats



Avec la loi organique du 14 février 2014 interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur, la France a fait le choix d’en finir avec le cumul des mandats. Cette pratique faisait exception en Europe (elle est interdite dans plusieurs pays). Le cumul entre mandats nationaux et locaux ne fait pas que nuire au travail parlementaire. Il nourrit le sentiment que le personnel politique collectionne les positions à des fins d’avantage personnel et se réserve l’accès aux fonctions électives. Il est regardé par les citoyens comme le symbole des dysfonctionnements de la démocratie représentative. Sa mise en œuvre effective devrait contribuer à réconcilier les Français avec leur système politique. La question de la limitation des mandats électifs dans le temps devra également être examinée.



             Réduire l’écart aujourd’hui considérable entre la composition des assemblées d’élus et celle de la population



Cet écart (en termes sociologiques, professionnels, générationnels, de sexe, de représentation des minorités) est aujourd’hui trop grand pour ne pas affecter la perception par les citoyens de leur propre représentation.

Le non-cumul des mandats contribuera sans doute à le réduire en favorisant le renouvellement des élus. Mais de nouvelles règles n’y suffiront pas. Elles doivent s’accompagner d’un changement de pratiques qui relève au premier chef de la responsabilité des partis politiques. Il n’est pas sûr qu’ils y soient à ce stade préparés.

Si l’on constate en effet un effort pour renouveler les élus, on observe également une tendance à une professionnalisation de la vie politique : 40 % des nouveaux députés élus en 2012 n’ont jamais exercé d’autre métier que politique. Il y a là un risque de voir se creuser plus encore le fossé qui sépare les élus des citoyens. Rénover le statut de l’élu, pour permettre de mieux concilier vie politique et vie professionnelle, devient impératif.



              Simplifier l’organisation de l’exécutif



La dualité Élysée-Matignon, le nombre souvent élevé de ministres de plein exercice et la taille des cabinets ministériels sont à la fois de puissants facteurs d’entropie et des obstacles à l’identification des responsabilités par les citoyens. La lourdeur et la complexité des structures exécutives sont une spécificité française : aucun autre grand pays, Russie exceptée, n’est gouverné par une dyarchie ; leurs ministres sont de coutume peu nombreux ; au printemps 2014, le gouvernement comptait 16 membres en Allemagne, 22 (membres du cabinet) au Royaume-Uni, 16 en Italie, 14 en Espagne, 15 aux États-Unis et 19 au Japon. Quant aux cabinets ministériels, les conseillers y sont plus nombreux en France que partout ailleurs.
Pour prolonger l’avancée que constitue la nomination en avril 2014 d’une équipe gouvernementale resserrée, il serait souhaitable de stabiliser la structure du gouvernement en ne modifiant pas les périmètres ou attributions des ministères à chaque remaniement. Cela conduirait à limiter durablement le nombre de portefeuilles et à simplifier l’organisation du travail de l’exécutif. Réduire parallèlement le nombre de conseillers ministériels, afin que les cabinets jouent leur rôle d’impulsion politique mais soient protégés de la tentation de se substituer aux administrations, permettrait de responsabiliser les directions d’administration centrale. Le Conseil d’État serait chargé de veiller dans la durée à l’effectivité de cette réorganisation. L’exécutif serait aux yeux des Français plus concentré, plus efficace et plus responsable.



Rétablir les rôles constitutionnels de la loi et du règlement



Dès 1991, le Conseil d’État pointait dans son rapport public1 les effets désastreux de la « logorrhée législative et réglementaire » : « Qui dit inflation dit dévalorisation : quand le droit bavarde, le citoyen ne lui prête plus qu’une oreille distraite. Pire, la multiplication des normes, leurs raffinements byzantins, l’impossibilité où l’on se trouve de pénétrer leurs couches de sédiments successives engendrent un sentiment d’angoisse diffuse ; le droit n’apparaît plus comme une protection mais comme une menace ».
Ce constat reste plus que jamais d’actualité. C’est le cas à tous les étages de la hiérarchie des normes, et en particulier de la loi. C’est à ce niveau qu’il faut agir en priorité. L’autorité de la loi passe aussi par sa clarté et sa stabilité. Empiéter sur le domaine réglementaire ne conduit qu’à en saper l’autorité. Notre Constitution prévoit pourtant un partage clair entre loi et règlement, réservant seulement l’essentiel au domaine législatif. Ce partage doit être restauré. La loi se recentrant sur l’essentiel, le règlement pourra à son tour retrouver sa place sans avoir à chercher à se glisser dans de nouveaux espaces et à alimenter de la sorte tant la marée normative que l’insécurité juridique. Cela suppose également un travail de révision en ce sens des principaux textes législatifs, notamment des codes existants.



Réformer l’organisation territoriale pour assurer efficacité et responsabilité



Depuis la loi Defferre de 1982, la France est entrée dans une logique de gouvernance à plusieurs niveaux mais sans s’être dotée d’une doctrine construite quant à la distribution des compétences entre ceux-ci. Au fil des années, les recouvrements de compétences se sont multipliés et les problèmes de coordination entre niveaux d’administration ont proliféré. Cet enchevêtrement n’est pas seulement coûteux et inefficace. Il est aussi source d’opacité pour les citoyens et il nuit à la reddition des comptes par les élus. Qui plus est, la disjonction entre une carte administrative bâtie sur un maillage hérité du XVIIIe siècle et une carte économique et sociale en mutation rapide n’a fait que s’accroître.
L’impulsion politique à une réforme territoriale d’ampleur a été donnée au printemps 2014. Sa mise en œuvre sera nécessairement longue. Il importe donc d’être au clair sur les objectifs qu’une telle entreprise doit s’assigner.

D’ici dix ans, la France doit à la fois réduire le nombre de niveaux d’administration territoriale et clarifier la distribution des compétences entre ceux-ci.


Délimiter les compétences des différents échelons territoriaux dans un double souci d’efficacité et de lisibilité


La confiance des citoyens se nourrit du droit qui est le leur de demander à chaque élu compte de son action. Les citoyens pourront pleinement exercer ce droit quand il aura été mis fin à l’enchevêtrement des responsabilités et qu’ils sauront qui, exactement, est responsable de quoi. La condition du succès est l’attribution aux différents niveaux de collectivités territoriales de compétences exclusives couvrant des champs suffisamment larges pour limiter les coûts de coordination. Cela impose d’abord de supprimer la clause de compétence générale qui permet à une collectivité locale d’agir dans tout domaine « d’intérêt local », alors même qu’aucun texte ne lui attribue une compétence. Cela exige ensuite de spécialiser les compétences, en affectant de manière exclusive la totalité d’une compétence à un seul échelon d’administration territoriale, alors qu’aujourd’hui les textes partagent bien souvent les mêmes compétences entre différents niveaux.

Parallèlement à cette délimitation des compétences entre les différents niveaux de collectivités territoriales, l’État doit vérifier si ses services territoriaux dans un certain nombre de domaines sont toujours nécessaires pour assurer la cohérence globale de l’action publique.

Rapprocher la carte administrative de la carte économique et sociale


La clarification des compétences ne produira tous ses effets que si elle s’accompagne d’une simplification des structures de l’administration territoriale. Selon l’Insee, la France compte aujourd’hui environ 1 700 « bassins de vie » au sein desquels s’organise la vie quotidienne des habitants. Ces bassins ne sont pas des abstractions : ils sont au contraire les nouveaux échelons de la vie collective où chacun travaille, fait ses courses, scolarise ses enfants, pratique le sport ou accède aux soins médicaux. Ils constituent de fait les nouvelles mailles élémentaires de la France contemporaine. Ce n’est pas par hasard qu’ils correspondent largement aux intercommunalités, dont le nombre (2 145) est à peine supérieur.


À horizon de dix ans, c’est autour de cet échelon de service collectif, socialement pertinent, qu’il faut structurer l’administration locale, le prélèvement fiscal et la redevabilité des élus. Cela suppose d’accélérer le regroupement des collectivités territoriales existantes en poursuivant l’expansion de l’échelon aujourd’hui intercommunal par le transfert des compétences des communes et en lui transférant, dans un souci de proximité, des compétences aujourd’hui exercées par le département.

L’approfondissement des intercommunalités devra se prolonger par la fusion des communes dans ces nouveaux cadres afin de donner aux intercommunalités une pleine identité démocratique. Plutôt que de choisir des maires qui leur sont proches, mais qui n’ont plus vraiment de capacité d’action autonome sur l’organisation de la vie collective à leur échelon, les Français disposeront d’élus moins nombreux mais pleinement responsables. Le périmètre actuel des communes gardera sa pertinence comme espace de démocratie participative.

Renforcer les fonctions stratégiques des régions et organiser leur coopération avec les métropoles


La réduction du nombre de régions annoncée par le Premier ministre n’est pas seulement affaire de simplification. C’est aussi un enjeu de développement et d’équité.


Si l’on ne veut pas que les grandes villes deviennent des isolats soucieux de leur seule prospérité, la concentration des facteurs de développement économique dans les métropoles nécessitera des actions volontaristes pour assurer la diffusion des effets de la croissance sur l’ensemble du territoire. Ces actions ne seront mises en œuvre que si elles résultent d’un équilibre politique entre les résidents des grandes agglomérations et ceux des entités avoisinantes. En d’autres termes, il s’agit de faire coïncider la carte électorale et administrative avec la carte économique afin d’inciter les métropoles à se préoccuper du développement d’ensemble de leur région.

Cela implique que soient opérés un important renforcement des compétences des régions et des adaptations de leur périmètre par des regroupements ou des ajustements partiels. Ainsi, les régions atteindront toutes la taille critique qui leur permettra d’exercer des compétences plus nombreuses et plus complexes, mais chacune d’entre elles pourra aussi s’appuyer sur une métropole ou une agglomération dynamique. Et réciproquement, chaque métropole contribuera au développement de son environnement.

À cette aune, on peut donc considérer qu’une structuration du territoire autour de dix à quinze régions est une cible pertinente. C’est à la condition de reposer sur un équilibre politique entre aires métropolitaines, villes moyennes et zones rurales que l’échelon régional pourra pleinement exercer ses compétences économiques, participer au redressement de la compétitivité et contribuer à l’équilibre du territoire.

            Dépasser le cadre départemental


En rapprochant la carte politique du territoire de la carte économique et sociale, une structuration telle que celle qui est ici proposée permettra de stimuler le développement, de mieux organiser les solidarités et de répondre plus efficacement aux besoins sociaux. Elle pose inévitablement la question du devenir des conseils généraux. Dans les grandes agglomérations, ceux-ci devront, à l’instar du conseil général du Rhône, se dissoudre dans les métropoles et les grandes agglomérations. Toutefois, il est probable que, dans certaines zones rurales ou faiblement urbanisées, les collectivités locales issues des intercommunalités ne seront pas en mesure d’exercer dans des conditions satisfaisantes toutes les compétences aujourd’hui dévolues au département. Celles-ci auront vocation à être prises en charge prioritairement par la région.


            Promouvoir l’engagement citoyen et social

 

Comme de nombreux pays, la France fait de plus en plus de place à d’autres formes de démocratie que la seule démocratie représentative. L’autonomie des partenaires sociaux a ainsi été accrue et les syndicats de salariés ont gagné en légitimité avec l’établissement de procédures transparentes et régulières de mesure de leur représentativité. Les pratiques participatives ont par ailleurs gagné du terrain, en particulier mais pas seulement à l’échelon local. Il reste que la progression de ces pratiques participatives a été significativement plus lente que n’a pu l’être l’approfondissement de la démocratie sociale, et que l’articulation entre ces formes d’engagement et la démocratie représentative demeure mal définie ou imprécise.

Il faut donc :
Articuler de manière plus lisible démocratie politique et démocratie sociale

L’articulation entre démocratie politique et démocratie sociale est incompréhensible pour le citoyen. D’un côté, les partenaires sociaux sont associés à la gouvernance et à la gestion d’organismes sociaux (assurance maladie, caisses de retraite, caisses d’allocations familiales) dont les orientations sont en fait définies par la loi. De l’autre côté, le Parlement adopte – sur l’emploi par exemple – des lois censées transcrire les accords négociés par les partenaires sociaux. Au lieu de combiner deux légitimités, l’une politique et l’autre sociale, le risque est bien souvent de les affaiblir toutes les deux.

Comme celle de la démocratie locale, la légitimité de la démocratie sociale appelle une clarification des responsabilités et des compétences. S’agissant des institutions, il y a lieu de s’interroger sur la pertinence d’une association des partenaires sociaux à la gestion de certains organismes qui sont de fait devenus des opérateurs de l’État et dans lesquels ils ne disposent pas de pouvoir effectif. Une telle situation ne rehausse pas plus leur légitimité qu’elle ne concourt à une bonne administration des organismes concernés.

S’agissant des domaines de compétence respectifs de la négociation sociale et de la loi, les accords nationaux interprofessionnels entre partenaires sociaux gagneraient à être plus souvent, à dix ans, d’application directe, à l’instar de ce qui se pratique chez certains de nos voisins. À défaut et dans l’immédiat, des règles de méthode sont au moins nécessaires. En particulier, le cahier des charges précis des négociations que le responsable politique souhaite voir s’ouvrir et les conditions requises pour qu’un accord donne lieu à transcription doivent être clairement et publiquement définis par le gouvernement, celui-ci pouvant garder la liberté de proposer au Parlement d’amender un accord social qui ne répondrait pas aux objectifs fixés.

Mettre en œuvre ces transformations demande des acteurs du dialogue social légitimes et responsables. Cela suppose d’abord, pour toutes les parties prenantes, des procédures précises de vérification de la représentativité ; celles-ci existent déjà pour les syndicats de salariés, elles vont être mises en œuvre pour les organisations patronales. Cela suppose ensuite, pour tous, une complète transparence des financements.

Offrir davantage d’espace à la participation des citoyens


Que ce soit dans un objectif démocratique (redonner confiance au citoyen), à fin d’expertise (mieux comprendre les besoins) ou dans un but opérationnel (faciliter la mise en œuvre des politiques), le développement de la concertation et de la participation des citoyens aux décisions politiques peut offrir un rôle accru au mouvement associatif et apporter un complément à la démocratie représentative. Concrètement, les citoyens devraient disposer au niveau communal de pouvoirs de décision sur certaines actions locales (affectation de crédits dans certaines enveloppes budgétaires, choix d’implantation de structures, organisation de services) ; au niveau national, les grandes réformes devraient plus souvent faire l’objet de consultations et débats publics organisés, préalables à la décision politique.

Quel que soit l’échelon, la France devrait se saisir des formes nouvelles de par ticipation citoyenne que permet la technologie. Les pouvoirs publics ne doivent pas considérer ces formes de participation comme une menace pour la démocratie représentative, mais au contraire comme une manière de l’irriguer en relayant les initiatives locales, en proposant un cadre à la participation, et en la valorisant.

Favoriser les autres formes d’engagement citoyen


La vitalité d’une démocratie ne se juge pas simplement au regard de l’engagement dans le débat démocratique. Elle se mesure aussi par d’autres formes d’engagement, notamment le bénévolat ou la participation à des associations, qui jouent un rôle déterminant dans la vie démocratique. Sans nécessairement passer par le levier fiscal ou social, l’État serait dans son rôle en créant un cadre reconnaissant mieux l’engagement associatif et bénévole, en particulier pour les jeunes dans leur parcours éducatif et pour les actifs dans leur parcours professionnel.

Plus largement, de nouvelles formes de participation et de nouvelles solidarités émergent, en grande partie permises par l’essor du numérique. Si la participation demeure fortement structurée dans la vie civile, notamment via le monde associatif (en 2012, 41 % des personnes interrogées déclaraient faire partie d’au moins une association), on observe une mutation du bénévolat et des dons aux associations caritatives : l’engagement devient plus « horizontal », plus « communautaire », les mobilisations se font plus ponctuelles, les individus choisissant leur cause au cas par cas, le profil même des bénévoles évolue avec un investissement plus fort des jeunes.

Cette évolution de l’engagement traduit une nouvelle quête de lien social. Elle conduit aussi à l’émergence de modes alternatifs de consommation et de production, liés à l’essor des réseaux sociaux et qui traduisent un engagement éthique. En cela, elle permet le développement d’une nouvelle économie, qui rend plus poreuse la frontière entre l’engagement solidaire et l’économie. Par exemple, l’« économie collaborative » repose sur le partage ou la location d’un bien ou d’un service (covoiturage, partage de locaux, etc.), sur le recyclage (vente d’objets d’occasion) ou sur le financement participatif (prêts entre particuliers, etc.). À dix ans, cette tendance devrait continuer à s’amplifier, ce qui rend d’autant plus urgent d’évaluer les retombées socioéconomiques et environnementales de ces comportements.


LES INDICATEURS D’UNE DÉMOCRATIE DE LA CONFIANCE

 

  • 70 % de participation aux élections législatives. Les élections législatives, pourtant au cœur de la démocratie représentative, connaissent une désaffection croissante : le taux de participation qui s’élevait à 83% en 1978 n’a été que de 57% en 2012. Cette désaffection, qui est en partie l’effet de la focalisation sur le scrutin présidentiel, nuit à la perception par les citoyens du rôle et de l’autonomie du législatif. L’objectif est de revenir à un taux de 70%, qui correspond à la participation moyenne enregistrée entre 1981 et 1993.
  • 50 % de la dépense publique locale réalisée via les intercommunalités. En dépit de son développement, la place de l’intercommunalité reste limitée en France, alors qu’elle contribue à une rationalisation de l’action publique locale : en 2012, les intercommunalités ne représentaient que 17 % des dépenses publiques locales, contre environ 41 % pour les communes, 30 % pour les départements et 12 % pour les régions. La place des intercommunalités a toutefois presque doublé depuis 2000. Ce processus a vocation à se poursuivre et à s’accélérer de manière à ce qu’elles exercent, à côté des régions, l’essentiel des compétences locales. L’objectif est donc de porter à 50% la part des intercommunalités en 2025, soit l’équivalent d’un triplement.
  • La moitié des Français engagés dans une activité bénévole. En 2010, 37% des Français avaient exercé une activité bénévole. Si l’engagement est en France plus élevé que dans les pays d’Europe du Sud, il reste en retrait par rapport à des pays comme les Pays-Bas, la Suède ou le Danemark, où le taux dépasse les 50%. L’objectif est d’atteindre ce seuil dans les dix ans qui viennent.

(1) Le baromètre de la confiance politique, vague 5, décembre 2013, CEVIPOF.

(1) Conseil d’État (1991), De la sécurité juridique, rapport public.