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Unadel écoutes territoriales 5 et 6 juin 2023

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Ma contribution aux écoutes par l'Unadel, du territoire pays de Fayence en 2023.

 

Vous avez pris connaissance des caractéristiques de notre territoire lors de notre candidature à ces écoutes 2023 et  depuis hier, lors des entretiens que vous avez eus avec  les acteurs d'influence de nos communes. qui vous ont été désignés par nos trois  référents, René Bouchard, Samuel Bertrandy et Guy Ledoux.  

Je me focaliserai sur 3 aspects: l'eau, l'urbanisation et la gouvernance. Ces éléments sont partie des thèmes Habiter, Travailler et Agir tels qu'envisagés dans les échanges Zoom que vous avez eus. 

 

1: L'eau 

 

La disponibilité d'eau potable sur le territoire est devenue une préoccupation angoissante depuis la sécheresse de 2022, la rupture d'approvisionnement de la commune de Seillans et la nécessité d'alimenter le  réservoir le plus haut de la commune par des camions citernes  plusieurs fois par jour.  Les médias et la presse locale ont diffusé largement ces informations en interrogeant des élus, notamment de Seillans. 

La situation de Seillans est particulière car elle dépend pour 85% de sources qui lui sont propres et qui se sont taries dans la situation de sécheresse particulière de 2021- 2022,  liée au changement climatique.

 

L'eau au sens large, c'est à dire avec l'assainissement collectif et non collectif, est devenue une compétence communautaire le 1/1/2020. Auparavant elle était de la compétence de chaque commune. Lors du transfert de cette compétence, la communauté a créé une régie intercommunale pour gérer l'ensemble du système.

 

En ce qui concerne l'eau, ce système se compose de deux entités: la production d'eau brute, son transport et sa distribution aux réservoirs de stockage des communes  où elle est rendue potable par simple traitement de chloration. Le réseau d'eau brute a un linéaire de 94km en grosses conduites - de 500 à 200mm; les réseaux d'eau potable servis par les réservoirs des communes ont un linéaire de 524km et des conduites de plus en plus petites jusqu'au compteurs des abonnés au nombre de 17609 pour une population permanente recensée INSEE de 28500 en 2020. 

 

La production d'eau a été de 5086554m3 en 2020 ce qui donne une production - consommée - par habitant de 490 litres/jour, ce qui est élevé par rapport à la moyenne nationale qui est de 149 litres/jour. Mais ces chiffres ne tiennent pas compte du nombre de résidences secondaires de 25% sur l'ensemble du territoire pendant 5-6 mois,  ni de la population touristique accueillie l'été pendant 3 mois dans les résidences privées  en formule AirB&B, ni dans les campings, ni lors de  visites journalières.  Il faudrait calculer un nombre d'habitants équivalent année. C'est ainsi que l'on estimerait une population équivalent année de l'ordre de 38000 habitants et une consommation un peu plus faible. 367 litres/jour ce qui est toujours deux fois plus élevé que la moyenne nationale. 

 

Les communes du pays de Fayence servies par ce réseau sont Fayence - et par une dérivation sur le réservoir le plus haut de la commune une petite partie de Seillans - Tourrettes, Callian, Montauroux village et le hameau des Esterets du lac, Saint-Paul en forêt et Bagnols en Forêt. La commune de Tanneron est servie par une source indépendante: un pompage dans le cours de la Siagne.

 

Ce réseau d'eau brute descend jusqu'à la côte par une  grosse conduite dite  conduite Sud; elle sert successivement les  Esterets du lac (hameau de Montauroux) par une station de pompage, et les communes extérieures au pays de Fayence à savoir les Adrets de l'Esterel et  Saint Jean de Cannes (une commune de Fréjus) par deux stations de pompage - Fonfreye et Fustière -  le camp militaire de Fréjus,  et en dernier le réservoir du Gargalon qui sert partiellement les communes de Fréjus et Saint-Raphaël qui ont de nombreuses autres sources gérées par le SEVE syndicat des eaux du Var Est, sous délégation à Véolia.

 

Cette situation complexe aujourd'hui est le résultat de la remise en état à la fin du 19è siècle des sources de la Siagnole, résurgences vauclusiennes  d'un vaste bassin karstique de 540km2, qui avaient été captées par les Romains pour alimenter Fréjus par un réseau d'aqueducs. L'histoire de ces sources est ici: http://t.ly/vYB_

 

Les sources de la Siagnole étaient dès 1891 et sont toujours, propriété du département du Var. En 1993, le département avait crée une société d'économie mixte 60% public - le département , 40% privé - Véolia -  pour gérer, moderniser et étendre ce réseau.  C'était la société E2S. présidée par François Cavallier le maire de Callian depuis 1996. Les sociétés d'économie mixtes étaient la philosophie de l'état à cette époque. E2S a accompli sa mission en modernisant le réseau, en l'agrandissant et en créant des sources supplémentaires par des forages profonds dans l'aquifère toarcien de la plaine de Fayence, alimenté par les pluies en nappe phréatique et aussi par les rus issus du réseau karstique,  en aval  des sources de la Siagnole.

 

Le synoptique simplifié du réseau d'eau bruite fin 2020 lors de la fin d'E2S le 1/11/2020 est ici.

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Bon an mal an, la quantité d'eau brute prélevée aux sources de la Siagnole, depuis des années, pour alimenter le réseau tel qu'il a été construit par E2S, est de l'ordre de 10 millions de m3  dont 55% sont consommés par le pays de Fayence et 45% par les communes extérieures.  Les sources supplémentaires des forages ont été peu utilisées - la Barrière depuis 2005 et Tassy depuis 2013. Le réservoir du Gargalon constitue l'exutoire ultime du réseau qui assure que toute l'eau prélevée aux sources, mettant le réseau en pression hydraulique, est utilisée.

 

Le débit total des sources est largement supérieur aux prélèvements en périodes de pluviométrie normale de sorte que le débit restant qui alimente la rivière de la Siagnole, affluent de la Siagne, est conséquent.  C'est en période d'étiage qui commence en été et se prolonge habituellement jusqu'à la fin de l'automne que la situation devient plus tendue. L'état par le ministère de l'écologie  a imposé des débits minimum pour la rivière qui sont de 40l/seconde en été - de juillet à octobre -  et de 100l/seconde en hiver - de novembre à juin.  Jusqu'à présent même en cas de prélèvements minimum de 183l/seconde comme en décembre 2017, il n'y a jamais eu d'insuffisance de l'eau prélevée, pour maintenir tous les réservoirs alimentés en permanence. Des  ruptures d'approvisionnements se sont produits pour certains réservoirs mais c'était toujours à cause de fuites accidentelles sur des conduites.

 

La possibilité de réduction du débit des sources de la Siagnole au point de ne pas pouvoir prélever et alimenter tous les réservoirs en permanence, pour les niveaux de consommation de toute la population - permanents, secondaires et saisonniers  doit être envisagée;  c'est pour quoi il faut recommander des usages de sobriété en ce qui concerne les arrosages, les jardins potagers et d'agrément, les usages domestiques et collectifs. Il s'agit d'anticipations, de scénarios et de mesures d'adaptation, ce que je relie aux propos sur la gouvernance en fin de ma contribution. 

 

Avec une consommation de 400l/jour et par habitant équivalent an, les prélèvements nécessaires sont de 174.9l/sec comme en fin 2017; en réduisant les consommations à 200l/personne et par jour, les prélèvements diminueraient à 84.5 litres/sec. C'est ce qu'il faut atteindre.  Mes calculs sont donnés ci-après.

 

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A plus long terme, en cas de tarissement des sources, la communauté de communes envisage d'utiliser l'eau du lac de Saint-Cassien par un accord avec la société du canal de Provence,  ce qui nécessite de la pomper et de la traiter pour la rendre potable. et aussi de construire un système de stockage pour alimenter les réservoirs. Personnellement je pense qu'en cas de sécheresse grave à l'avenir, le lac de Saint-Cassien sera affecté de la même manière que les sources, car le réseau karstique qui l'alimente est plus étendu à l'Est mais il dépend de la même pluviométrie. A noter que le golf de Terre Blanche a un droit de pompage sur le lac de Saint-Cassien de 0.6 million de m3/an qu'il utilise pour remplir des petits lacs de stockage.  La réutilisation des eaux usées des stations d'assainissement est aussi envisagée.

 

Je signale pour conclure ce point que l'état lance une consultation publique pour l'adaptation au changement climatique dans la perspective d'une hausse de la température en France de +4° d'ici la fin de ce siècle.  Scénarios 1.5°, 2° ou 4°, l'exercice a pour but de dire quelles mesures prendre pour s'y adapter. Voir l'article du Monde sur cela. https://tinyurl.com/2qdttbdp Cela rejoint mon propos sur la gouvernance qui vient en fin de ma contribution.

 

En poursuivant sur mes deux autres points, l'urbanisation et la gouvernance, je veux souligner le caractère systémique de tous les éléments qui sont interconnectés.

 

2: L'urbanisation

 

L'urbanisation a un rapport systémique avec l'eau. Car vu que le pays de Fayence a pour quasi seule ressource les résurgences vauclusiennes de la Siagnole, vu la situation tendue de ces ressources en périodes d'étiage et d'ores et déjà la nécessité d'appeler à réduire les consommations individuelles et collectives de manière importante, en passant de 400 litres par jour et par habitant à 200...  un accroissement supplémentaire de population permanente et temporaire paraît très difficile. D'autant que depuis quelques années, les habitants font pression sur les élus pour réduire la croissance des constructions .

 

Pourtant l'attractivité du territoire pour de nouveaux habitants reste élevée en raison de l'environnement, du climat, de la proximité de la côte d'azur.  Au cours des 30 dernières années la population est passée de  

5596 habitants en 1962, 6237 en 1968, 10450  en 1982, 13660 en 1990, 18127 en 1999, 21000 en 2008 et 28500 aujourd'hui, soit une multiplication par 5.  Les modifications d'habitat permises par la mobilité d'après guerre - l'automobile, l'électricité et les techniques de construction - sous forme de résidences individuelles, se sont d'abord faites à la périphérie des villages: à l'amont, à l'Est et à l'Ouest et à l'aval immédiat. Voir cette évolution (source les recensements de l'INSEE).

 

Le développement du pays de Fayence, la croissance de sa population, la consommation foncière,  l'état de la plaine, ont fait l'objet  dans les années 2010 de l'élaboration des  PLU et  du  SCOT, les 4 communes noyau (Fayence, Tourrettes, Callian et Montauroux) et les 4 communes périphériques (Seillans, Mons, Tanneron et Saint-Paul en Forêt), plus depuis 2014,  la commune de Bagnols en Forêt qui a rejoint la Communauté après la réforme territoriale. 


Les élus des communes ont naturellement considéré cet afflux d'immigrants comme positif pour leurs communes respectives:  un retour de population vers des communes autrefois rurales, et qui avaient connu après la 2è guerre mondiale une dépopulation, les locaux étant partis, attirés vers les villes.

Ce ne sont pas les mêmes populations qui sont revenues. Attirés par le pays, les visiteurs séduits demandent des logements de qualité, comme en témoigne le nombre d'agences immobilières présentes sur le canton depuis longtemps. Ces nouveaux migrants ne sont pas tous attirés vers les villages anciens. C'est vers les espaces autour des villages, autrefois exploités par leurs habitants pour leur subsistance, que les migrants sont attirés. Les élus ont donc laissé s'installer dans ces espaces des villas sur de grands terrains. Obligés d'accompagner le mouvement, ils ont développé les infrastructures de réseaux à proximité des villages, les écoles, ouvert des espaces dédiés aux activités commerciales et les commerçants sont progressivement venus s'y installer. Le formidable développement de la plaine, notamment sur Montauroux Fondurane et Callian Agora est la conséquence de cet afflux de population nouvelle.

Aujourd'hui, les élus sont confrontés aux limites de ce processus de développement. Le nouveau code de l'urbanisme et la loi SRU d'une part, les PLU, les SCOT, l'obligation d'assurer la voirie et les réseaux, notamment la distribution d'eau potable et l'assainissement. C'est la raison pour laquelle les élus s'interrogent sur un ralentissement de la croissance de la population. A mon sens, ceci ne peut être que le résultat d'une nouvelle politique de développement par une modification des PLU et du SCOT. Dire où on construit en fonction des caractéristiques des territoires et des possibilités et ressources des communes. C'est de ce choix que résultera le nombre de logements possibles et donc l'accroissement de la population dans les décennies à venir. Cet exercice est en cours avec les modifications des  PLU et du SCOT dans le contexte économique et social actuel de la transition climatique et de la problématique de l'eau.

 

La loi Alur s'ajoutant à la loi SRU et appliquée partout en zones urbaines comme en zones rurales et semi rurales, est venue compliquer davantage le problème. La suppression des surfaces minimum pour construire, a provoqué un appel d'air pour des petits lotissements à prix abordables qui ont attiré davantage de migrants, notamment des villes saturées des Alpes Maritimes.

 

Autre difficulté, est la politique du zéro artificialisation nette ZAN que l'état veut imposer d'ici 2050. Là encore une mesure qui serait appliquée partout.  L'artificialisation des sols, également appelée imperméabilisation des sols, fait référence au processus de transformation des terres naturelles en surfaces artificielles non perméables, telles que les routes, les parkings, les bâtiments, les zones d'activités commerciales, d'artisanat, industrielles, les zones bétonnées, pavées et bituminées, etc. Cela entraîne la perte de la capacité des sols à absorber l'eau et à laisser circuler l'air, ce qui a un impact significatif sur l'environnement et les écosystèmes.  Là aussi le concept appliqué partout pour tous est un sujet de controverse. Voir mon billet sur ce sujet http://t.ly/_LHS


Le développement de la plaine le long de la route départementale RD562 est un autre sujet majeur de ce pays. C'est d'abord l'axe principal de mobilité de la population qui dépend de la voiture individuelle pour se déplacer localement et aller au travail. 40% de la population active se rend dans les bassins d'emploi extérieurs au territoire par cette route et la D37 jusqu'à l'autoroute A8. Cette route est calibrée pour le trafic tel qu'il était il y a 40 ans; et il est impossible de l'élargir pour des raisons  foncières. Un route alternative est envisagée mais elle n'a pas aboutie. En savoir plus par ce lien http://t.ly/o2Ma

 

Cette  route est aussi un espace urbain en devenir. Il faut parfaire ce développement pour atteindre un bon équilibre entre les espaces commerciaux et artisanaux, promouvoir du résidentiel groupé, et préserver les espaces agricoles. Tel est le défi pour les élus des communes les plus concernées, les communes noyau: Fayence, Tourrettes Callian et Montauroux.  En savoir plus par ce lien http://bit.ly/TuIZwk

 

3: La gouvernance

 

Sur ce point, il me semble nécessaire que la construction des décisions pries au niveau de la communauté de communes et des communes soit plus largement expliquée pour obtenir l'agrément des habitants et éviter la fragmentation de la société comme actuellement. C'est le changement d'époque qui veut cela: avec la multiplicité des réseaux sociaux, les demandes de participation citoyennes et l'intelligence artificielle que je qualifie d'intelligence collective.  Ce nouveau mode de gouvernance s'impose à tous les niveaux,  national, régional et local. 

 

Au niveau local  voici quelques éléments clés du processus de construction des décisions:

 

  1. Identification du problème : Les problèmes spécifiques à la communauté locale sont identifiés, qu'il s'agisse de questions économiques, sociales, environnementales, d'infrastructures ou autres. Cela peut être fait par le biais de consultations publiques, de réunions avec les parties prenantes locales, de collecte de données ou de rapports d'experts.

  2. Participation citoyenne : Les gouvernements locaux devraient impliquer les citoyens dans le processus décisionnel en organisant des réunions publiques, des forums, des enquêtes ou des consultations pour recueillir leurs opinions et leurs suggestions. Cela permettrait d'assurer une prise de décision plus démocratique et de tenir compte des préoccupations et des besoins des résidents locaux.

  3. Analyse des options : Les différentes options politiques pour résoudre le problème identifié sont étudiées. Cela peut impliquer des analyses coûts-avantages, des évaluations des impacts environnementaux ou sociaux, des études de faisabilité, etc. Les gouvernements locaux peuvent également solliciter l'avis d'experts ou de commissions consultatives pour éclairer la prise de décisions. 

  4. Prise de décision : Les décisions politiques sont prises par les responsables élus ou par les organes de gouvernance locaux, tels que les conseils municipaux ou les assemblées législatives locales. Ces décisions peuvent être basées sur les recommandations des fonctionnaires locaux ou des comités spécialisés. Toujours vu les contraintes, les compromis s'imposent.

  5. Mise en œuvre : Une fois la décision prise, elle est mise en œuvre par la gouvernance locale: communes et Communauté de Communes. Cela peut impliquer l'élaboration de politiques, l'adoption de règlements, l'allocation de ressources budgétaires, la coordination avec d'autres acteurs locaux, etc.

  6. Suivi et évaluation : Les décisions politiques locales sont suivies et évaluées pour mesurer leur impact et leur efficacité. Cela peut se faire à travers des mécanismes de surveillance, des évaluations régulières, des consultations citoyennes ou des rapports d'évaluation.

Dans le processus décisionnel local, il est important d'assurer la transparence, la publication via  les sites des mairies et de la Communauté de Communes, de tous les réseaux sociaux existants,  afin d'encourager la participation citoyenne et le dialogue ouvert pour répondre aux besoins spécifiques de la communauté locale et ainsi assurer une gouvernance démocratique.

 

Comme exemple je prendrai la question de l'eau. Amener les habitants permanents et saisonniers à la sobriété des usages cf. le point 1 identification du problème (comme exposé par ci-dessus, comme une participation citoyenne); le point 2 participation citoyenne au sens large;  et le point 3: la tarification incitative est une option possible en plus de l'appel citoyen à la sobriété, sachant toutefois que les plus riches ne sont pas sensibles au prix.