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INTERNATIONAL • ISRAËL
Mahmoud Abbas, le président palestinien, auteur d’un nouveau dérapage antisémite

Dans un discours devant les membres de son parti, le Fatah, le dirigeant de Ramallah a affirmé que le génocide des juifs, durant la seconde guerre mondiale, avait été causé par « leur rôle dans la société, qui avait trait à l’usure ».

Par Louis Imbert (Jérusalem, correspondant) 

 

Une nouvelle diatribe antisémite du président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, passée d’abord inaperçue, a émergé le 6 septembre et suscité la réprobation. Devant le conseil révolutionnaire du Fatah, le Parlement de son parti réuni à Ramallah, le plus vieux dirigeant du monde arabe (87 ans) avait dressé le 24 août une histoire du peuple juif, de ses origines et de ses persécutions en Europe, qui l’a amené à nier le fait que l’antisémitisme du régime nazi ait conduit à la Shoah durant la seconde guerre mondiale.

« Ils disent qu’Hitler a tué les juifs parce qu’ils étaient juifs, et que l’Europe haïssait les juifs parce qu’ils étaient juifs. C’est faux. (...) Les [Européens] ont combattu ces gens en raison de leur rôle dans la société, qui avait trait à l’usure, à l’argent. (...) Selon [Hitler], ils faisaient du sabotage et c’est pourquoi il les haïssait », a affirmé M. Abbas.

Le président palestinien tenait « à clarifier pour le monde » une « vérité » : les juifs d’Europe n’ont pas pu, selon lui, être victimes d’antisémitisme, n’étant pas sémites. Il reprenait ainsi à son compte une théorie controversée selon laquelle les juifs ashkénazes ne sont pas originaires du Proche-Orient, mais descendent d’une tribu nomade d’Asie centrale, les Khazars, convertie au judaïsme au Moyen- Age. Cet argumentaire a alimenté ces dernières années des discours conspirationnistes.

 

« Une insulte »

La pseudo-leçon d’histoire du raïs de Ramallah était noyée dans l’un de ses discours fleuves que la télévision officielle palestinienne diffuse en direct, dans l’indifférence des habitants de Cisjordanie et de Gaza, pour qui Abbas n’a jamais été aussi faible et discrédité.

Ce laïus a été rendu public le 6 septembre par le Middle East Media Research Institute (Memri), un site Internet pro-israélien qui tient une veille des médias arabes et iraniens. Le président du mémorial de Yad Vashem à Jérusalem, Dani Dayan, a jugé que ces déclarations « ne sont pas seulement un exemple de négation et de distorsion de l’Holocauste : elles font usage de stéréotypes antisémites profondément ancrés ».

L’ambassadeur d’Allemagne en Israël, Steffen Seibert, a dénoncé « une insulte à la mémoire de millions d’hommes, de femmes et d’enfants assassinés », ajoutant que « les Palestiniens méritent d’entendre de leurs dirigeants la vérité historique ». Washington et Paris ont également condamné ces propos. L’Union européenne a ajouté que ces déclarations « font le jeu de ceux qui ne veulent pas d’une solution à deux Etats, pour laquelle le président Abbas a plaidé à maintes reprises ».

 

Déjà en 2018 et 2022

Pour provocateur qu’il soit, cet argumentaire n’est pas exceptionnel pour M. Abbas. Le chef de l’OLP (Organisation de libération de la Palestine) a plusieurs fois qualifié la Shoah de « crime le plus haineux de l’histoire moderne de l’humanité »,mais il traîne aussi un passif de déclarations relativisant son ampleur, à connotations antisémites.

Auteur d’une thèse universitaire empreinte de révisionnisme sur « Les liens entre le nazisme et le sionisme, 1933-1945 », défendue à Moscou au début des années 1980, M. Abbas avait déjà expliqué en 2018 la haine des juifs et leur persécution en Europe par leur « fonction sociale, qui était liée à l’usure, à la banque, etc. » Comme dans son discours du 24 août, il citait alors Karl Marx et expliquait que les juifs ashkénazes n’étaient pas sémites. Il avait rapidement présenté des excuses.

En août 2022, de passage à Berlin pour un suivi médical, M. Abbas avait suscité l’indignation de son hôte, le chancelier allemand Olaf Scholz, en estimant qu’Israël avait perpétré « 50 holocaustes » en Palestine depuis 1947. Il répondait à une question sur la prise d’otages perpétrée cinquante ans plus tôt, aux Jeux olympiques de Munich, par un commando palestinien. L’opération avait abouti à la mort de onze athlètes israéliens.

Suite au tollé suscité par cette déclaration, le premier ministre palestinien, Mohammed Shtayyeh, avait précisé que « le président n’a pas nié les massacres dont ont souffert les juifs sous l’Allemagne nazie, mais il a dit au monde de ne pas perdre de vue les massacres infligés au peuple palestinien ».

Louis Imbert (Jérusalem, correspondant)