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Il y a deux ans, la baisse du nombre de fonctionnaire avait fait partie des thèmes économiques qui avaient agité la campagne présidentielle. Pourtant, l'idée est loin de susciter une forte adhésion auprès des Français, si l'on en croit le sondage réalisé par Elabe pour « Les Echos », Radio classique et l'Institut Montaigne.

Ainsi seule une courte majorité (55 %) des personnes interrogées est favorable à la réduction de 50.000 postes dans la fonction publique d'Etat comme le propose l'exécutif. Et la proportion de Français opposés à la réduction de 70.000 agents évoquée pour les collectivités locales atteint 53 %. « On est clairement dans une attente de mieux, plutôt que de moins. Dans une période de difficultés et de souffrance sociale comme nous en vivons actuellement, c'est le besoin d'un Etat protecteur qui s'exprime », explique Bernard Sananès, le président d'Elabe.

Clivages politiques sur la question

Cette question crée de forts clivages dans la population française. Ils sont d'abord politiques : une mesure comme la baisse de 50.000 fonctionnaires dans la sphère de l'Etat est plébiscitée par ceux ayant voté François Fillon en 2017 (80 %) et rejetée par ceux de Jean-Luc Mélenchon (35 % d'opinions favorables). Les électeurs d'Emmanuel Macron en sont partisans à 64 %, « ce qui n'a rien d'un soutien massif » selon Bernard Sananès. Le deuxième clivage est sociologique, puisque la réaction est diamétralement opposée entre les 18-24 ans (40 % en faveur) et les personnes de plus de 65 ans (68 %).

Pour autant, même le soutien affiché par les plus âgés paraît fragile. La même catégorie réclame ainsi à 88 % une augmentation de postes pour la sécurité intérieure et à 79 % pour la santé. Ce jugement schizophrénique vaut pour l'ensemble des Français : en réalité, il n'y a guère que pour l'administration fiscalequ'on tend - sans l'atteindre - vers une majorité relative de Français d'accord pour baisser les effectifs. Ailleurs (éducation, justice, logement, sport, etc.), c'est soit une hausse soit un maintien des effectifs qui est demandé. « C'est le troisième clivage sur ces questions, entre le citoyen a priori d'accord pour réduire la dépense publique, et l'usager qui voit dans le fonctionnaire un élément du lien social », souligne Bernard Sananès.

 

D'autres mesures plus consensuelles

Le sondeur estime donc que « la baisse des effectifs de fonctionnaires n'est pas la bonne manière d'entrer dans le sujet de la réforme de l'Etat pour le gouvernement ». De fait, l'exécutif s'est gardé pour le moment de trop mettre en avant la baisse de 50.000 agents dans la fonction publique d'Etat - objectif qui paraît de toute façon lointain au vu de la très faible baisse (-6.000 environ) enregistrée pour les deux premières années du quinquennat.

Les autres mesures avancées par le gouvernement pour la réforme de la fonction publique font, en revanche, plus consensus. Ainsi 72 % des Français se disent favorables à la mise en place et à la publication d'indicateurs de résultats et de satisfaction pour chaque service public. La tendance est aussi positive pour la rémunération au mérite (63 %) voire le plan de départs volontaires pour les fonctionnaires (58 %). En revanche, le recours accru aux contractuels divise plus nettement les Français (avec 53 % de personnes favorables).

Sondage effectué les 6 et 7 novembre 2018, auprès d'un échantillon de 1.002 personnes selon la méthode des quotas.

Renaud Honoré