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Alaska, Patagonie, Alpes : partout dans le monde, la fonte des glaciers s’accélère

Ces sentinelles du climat ont perdu plus de 9 000 milliards de tonnes de glace depuis 1961, contribuant à l’élévation du niveau des mers.

Par Audrey Garric Publié aujourd’hui à 17h00, mis à jour à 17h03

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Vêlage (détachement d’une masse de glace) sur             le glacier Hubbard, en Alaska, en août 2018.Vêlage (détachement d’une masse de glace) sur le glacier Hubbard, en Alaska, en août 2018. Jim Mone / AP

Partout sur le globe, les glaciers se dévêtissent progressivement de leurs majestueux manteaux blancs aux nuances de bleu. Conséquence du réchauffement de l’atmosphère, ces sentinelles du climat ont perdu plus de 9 600 milliards de tonnes de glaces au cours des cinquante dernières années. A eux seuls, ils ont entraîné une élévation du niveau de la mer de 2,7 cm sur la période, contribuant pour 25 à 30 % de la hausse globale. Voilà les conclusions d’une étude parue dans Nature lundi 8 avril, la plus précise quant à l’observation des bouleversements qui affectent ces géants continentaux.

« Globalement, les glaciers perdent chaque année environ trois fois le volume de glace stockée dans l’ensemble des Alpes européennes », compare Michael Zemp, premier auteur de l’étude et glaciologue à l’université de Zurich (Suisse). « Nos résultats montrent que les glaciers continentaux, notamment la Patagonie, l’Alaska ou les Alpes, sont ceux qui sont le plus affectés par le climat, davantage que les calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique », qui ne font pas partie de l’étude, ajoute le second auteur, Emmanuel Thibert, glaciologue à l’université Grenoble Alpes et à l’Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture.

Pour mener cette étude, qui couvre 19 des régions les plus englacées du globe, l’équipe internationale de chercheurs s’est basée sur deux types de données recueillies entre 1961 et 2016 : des photographies aériennes et satellites de 19 000 glaciers du monde, permettant de calculer leurs pertes de masse sur de longues périodes ; et des observations de terrain (carottages, mesures de précipitations et de fonte) pour 450 d’entre eux, représentatifs de massifs entiers, afin de connaître leur variation et réponse annuelle au changement climatique.

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Résultat : la perte de masse s’est accélérée au cours des trente dernières années, particulièrement sur la décennie 2006-2016, pour atteindre 335 milliards de tonnes (Gt) de glaces perdues chaque année. Soit davantage que la fonte du Groenland (− 280 Gt par an entre 2002 et 2016) et de l’Antarctique (− 252 Gt par an entre 2009 et 2017), ces deux calottes glaciaires étant elles-mêmes engagées dans un grave processus de recul. Ces nouvelles estimations sont plus inquiétantes que les dernières parues dans Science en 2013, qui évoquaient 260 Gt en moins chaque année entre 2003 et 2009.

Les pertes de l’Alaska, un tiers du total mondial

Si la débâcle concerne la totalité des glaciers la planète, elle ne les affecte pas tous dans les mêmes proportions. Les sommets les plus touchés sont ceux des Andes du Sud (essentiellement la Patagonie), qui ont perdu en épaisseur l’équivalent de 1,18 mètre d’eau par an entre 2006 et 2016, devant les glaciers tropicaux (le nord de la cordillère des Andes, la Bolivie, l’Equateur, le Pérou et le Kilimandjaro en Afrique), avec − 1 mètre par an. Ils sont suivis par les montagnes du Caucase, d’Europe centrale (Alpes) et de l’Alaska, avec entre 85 et 90 cm de pertes.

Bilan de masse des glaciers dans 19 régions du monde             entre 1961 et 2016 (en gigatonnes). Tous sont négatifs (en             rouge), à l’exception de l’Asie du Sud-Ouest (en bleu).Bilan de masse des glaciers dans 19 régions du monde entre 1961 et 2016 (en gigatonnes). Tous sont négatifs (en rouge), à l’exception de l’Asie du Sud-Ouest (en bleu). Zemp/Nature

Les chercheurs ont également calculé la perte de masse globale des glaciers, en multipliant leur épaisseur par leur superficie. Cette fois, les records de fonte se trouvent dans les régions les plus englacées, à savoir l’Alaska (qui a perdu 3 000 Gt entre 1961 et 2016, soit un tiers du total mondial), l’Arctique nord-canadien et la périphérie du Groenland (hors calotte glaciaire). « A ce rythme, la majeure partie du volume des glaciers actuels aura disparu dans la seconde moitié du siècle, dans le Caucase, l’Europe centrale, l’ouest du Canada et des Etats-Unis et la Nouvelle-Zélande », indique l’étude.

A l’inverse, certains glaciers résistent mieux : les hautes montagnes d’Asie, dont font partie l’Himalaya ou l’Hindou Kouch, ont perdu en moyenne 20 cm d’équivalent en eau par an, deux fois moins que la moyenne mondiale. Plus étonnant encore, les massifs de l’ouest, en particulier le Karakoram, sont quasiment à l’équilibre, et certains glaciers ont même gagné en volume depuis 2000, notamment dans le Kunlun.

Comment expliquer ce que l’on appelle l’« anomalie de Karakoram » ? « Ces glaciers, notamment ceux de la région aride du Kunlun, pourraient être moins sensibles à l’élévation de la température. L’accroissement de l’irrigation liée à l’agriculture pourrait également envoyer plus d’eau dans l’atmosphère, qui entraînerait plus de précipitations. Mais nous manquons de mesures de terrain pour en comprendre les causes », expose Fanny Brun, glaciologue à l’université d’Utrecht (Pays-Bas). Mais de prévenir : « Il est probable que cette anomalie disparaisse dans les années à venir, car le signal du réchauffement climatique est tellement fort qu’il écrase tout. » En février, une vaste étude du Centre international de développement intégré de la montagne alertait sur le fait qu’entre un tiers et deux tiers des réserves glacières de ce « troisième pôle » pourraient fondre d’ici à la fin du siècle.

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3 mm par an d’élévation du niveau des mers

Une situation préoccupante, car certains glaciers représentent une importante ressource en eau au niveau local, dans l’Himalaya mais également dans les Andes, rappelle Emmanuel Thibert. « A la Paz, la capitale bolivienne, par exemple, 15 % de la ressource en eau est liée au déstockage des glaciers, ce qui ne va durer qu’un temps. »

Surtout, l’eau de fonte de ces glaciers se déverse dans les océans, contribuant à la hausse de leur niveau à raison de près d’1 mm par an. Au total, les mers s’élèvent aujourd’hui d’un peu plus de 3 mm par an en raison de la fonte des glaciers continentaux (qui y contribuent à hauteur de 28 %), mais aussi de celle des deux grands islandis du globe, le Groenland (28 %) et l’Antarctique (15 %), ainsi qu’en raison de la dilatation thermique des océans (29 %). « Le problème, c’est le cumul sur plusieurs décennies, qui menace de nombreuses régions côtières », précise le glaciologue.

En 2013, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) évoquait, dans son pire scénario (un réchauffement de plus de 4 °C qui accélérerait la débâcle des glaces), une élévation du niveau des mers de 98 cm d’ici à la fin du siècle, toutes causes confondues. Une mise à jour, intégrant l’accroissement de la contribution des calottes polaires, est prévue dans un rapport spécial du GIEC qui doit paraître en septembre sur les liens entre changement climatique, océans et glace.

« Les résultats publiés dans Nature sont intéressants dans le sens où ils montrent la complexité de la machine climatique, avec un réchauffement ni linéaire ni identique partout, estime Christian Vincent, spécialiste des glaciers de montagnes à l’Institut des géosciences de l’environnement de Grenoble, qui n’a pas participé à l’étude. Mais il faut savoir que ces bilans de masse globaux sous-estiment le changement climatique. La situation est en réalité pire. »

Audrey Garric


Protection de l’Antarctique : « La France et Emmanuel Macron ont la possibilité d’écrire l’histoire »

TRIBUNE

Sylvia Earle

Océanographe, exploratrice et auteure américaine

Pascal Lamy

Ex-directeur général de l’Organisation mondiale du commerce de 2005 à 2013

Alors que la Chine et l’Union européenne se réunissent pour leur sommet annuel le 9 avril, l’océanographe américaine Sylvia Earle et l’ex-directeur général de l’OMC Pascal Lamy demandent à Paris de profiter de ce forum pour convaincre Pékin de la nécessité de mieux protéger l’océan Austral.

Publié aujourd’hui à 16h04, mis à jour à 16h08   Temps deLecture 3 min.

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« La France et l’UE proposent notamment, avec           l’Australie, la protection de plus de 950 000 km2 dans           l’Antarctique de l’Est » (Base Dumont d'Urville, en terre           Adélie).« La France et l’UE proposent notamment, avec l’Australie, la protection de plus de 950 000 km2 dans l’Antarctique de l’Est » (Base Dumont d'Urville, en terre Adélie). Thorsten Milse/robertharding / Photononstop / Thorsten Milse

Tribune. L’Antarctique est l’endroit le plus froid, le plus venteux et le plus isolé de la Terre. Malgré cela, et peut-être grâce à cela, il joue un rôle majeur dans la régulation du bon état de la planète et du climat. L’océan Austral, qui encercle le continent antarctique, se caractérise par une biodiversité d’une incroyable richesse.

Le puissant courant circumpolaire envoie des nutriments dans toutes les régions océaniques de la planète. Il s’agit d’une masse d’eau extraordinaire dont nous bénéficions quotidiennement, où que nous nous trouvions. La protection de cet environnement est d’une importance historique pour notre époque : la France et Emmanuel Macron ont la possibilité d’écrire l’histoire.

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M. Macron et le président chinois Xi Jinping se sont rencontrés il y a quelques jours. De nombreux points ont été soulevés lors de cette rencontre, parmi lesquels le changement climatique et la protection de la biodiversité. Le 9 avril se tiendra à Bruxelles le sommet annuel Union européenne (UE)-Chine. M. Macron a beaucoup parlé de « rendre sa grandeur à notre planète » (« Make our planet great again ») et s’est engagé à agir à travers le lancement du projet de Pacte mondial pour l’environnement.

La crédibilité de la Chine

Une première étape consisterait à obtenir l’appui de la Chine à la protection de l’océan Austral. Cela stimulerait également la crédibilité de la Chine en matière de protection de l’environnement, à l’heure où elle se prépare à accueillir la COP15 de la Convention sur la diversité biologique (CDB) en 2020 qui décidera d’un plan décennal pour la protection de la nature. La Chine ambitionne en effet d’être à la biodiversité ce que la France est au changement climatique.

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Il y a quelques semaines à peine, une étude financée par la NASA a révélé que l’inlandsis [calotte glaciaire] de l’Antarctique perd six fois plus de glace chaque année que dans les années quatre-vingt, et que ce phénomène est en pleine accélération. Tant de glace a fondu que le niveau de la mer a monté de près de 1,5 cm en moyenne dans le monde depuis 1979, menaçant les zones côtières de faible altitude de la planète et la vie marine de l’Antarctique.

« L’océan Austral est riche en biodiversité: manchots,           baleines, phoques, albatros, poissons et calmars y abondent.           Mais tous dépendent de minuscules crevettes appelées krill »           (Photo: Krill/Euphausia superba).« L’océan Austral est riche en biodiversité: manchots, baleines, phoques, albatros, poissons et calmars y abondent. Mais tous dépendent de minuscules crevettes appelées krill » (Photo: Krill/Euphausia superba). Konrad Wothe/ImageBroker/Photononstop

L’océan Austral est riche en biodiversité : manchots, baleines, phoques, albatros, poissons et calmars y abondent. Mais tous dépendent de minuscules crevettes appelées krill. Le krill vit d’algues qui poussent sous la banquise. La fonte de la banquise implique une diminution du krill qui, à son tour, implique une diminution des manchots… et, en fin de compte, une diminution de la biodiversité.

Protection de plus de 950 000 km2

Bien que le continent antarctique soit protégé, une pêche commerciale du krill et de la légine antarctique continue d’être pratiquée dans l’océan Austral. Il est démontré que l’instauration de grandes aires marines protégées (AMP) est le meilleur moyen de protéger la biodiversité océanique et de renforcer la résilience au changement climatique.

« Bien que le continent antarctique soit protégé, une           pêche commerciale du krill et de la légine antarctique           continue d’être pratiquée dans l’océan Austral » (Photo:           légine).« Bien que le continent antarctique soit protégé, une pêche commerciale du krill et de la légine antarctique continue d’être pratiquée dans l’océan Austral » (Photo: légine). DR/Pierre Jullien

Les vingt-cinq Etats membres de la Commission pour la conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique (CCAMLR), l’organisme chargé de la conservation de l’océan Austral, ont introduit trois propositions de grandes AMP. La France et l’UE proposent notamment, avec l’Australie, la protection de plus de 950 000 km2 dans l’Antarctique de l’Est. Cette proposition a été soumise pour la première fois en 2011, mais la Russie et la Chine n’ont cessé d’en bloquer l’adoption.

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La voie du succès est par conséquent toute tracée : la France et la Chine peuvent mettre à profit cette occasion de protéger une vaste étendue de l’océan Austral lors de la réunion annuelle de la Commission pour la conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique (CCAMLR), démontrer ainsi leur leadership mondial en matière de changement climatique et de protection de la biodiversité, et créer un héritage durable pour l’océan et la santé de notre planète.

Sylvia Earle et Pascal Lamy sont tous les deux membres d’Antarctica2020, un réseau de personnalités qui appelle à la protection d’au moins 7 millions de km2 dans l’océan Austral d’ici 2020. Composé de leaders et d’influenceurs variés et puissants, ce groupe fait partie des dix projets de gouvernance accompagnés qui ont été sélectionnés en novembre 2018 par le Forum de Paris sur la paix d’Emmanuel Macron. Pascal Lamy préside le comité exécutif de ce Forum.

Sylvia Earle (Océanographe, exploratrice et auteure américaine) et Pascal Lamy (Ex-directeur général de l’Organisation mondiale du commerce de 2005 à 2013)


Pollution : une « zone à ultrabasse émission » entre en vigueur à Londres

Les conducteurs de véhicules vieux et polluants doivent désormais s’acquitter d’une nouvelle taxe de 14,50 euros pour accéder au centre de Londres (116 euros pour les camions et les cars).

Publié aujourd’hui à 12h17, mis à jour à 14h33

Temps deLecture 1 min.

Des voitures pénètrent dans la zone à ultrabasse émission           (ULEZ) mise en place lundi 8 avril.Des voitures pénètrent dans la zone à ultrabasse émission (ULEZ) mise en place lundi 8 avril. FRANK AUGSTEIN / AP

Les conducteurs de véhicules vieux et polluants doivent désormais s’acquitter d’une nouvelle taxe s’ils veulent rouler dans le centre de Londres, avec l’entrée en vigueur lundi 8 avril d’une zone à ultrabasse émission (ULEZ, acronyme d’Ultra Low Emission Zone).

Les conducteurs de voitures à essence construites avant 2006 et de véhicules diesel construits avant 2015 devront débourser 12,50 livres (14,50 euros) par jour pour entrer dans cette zone. Pour les camions et les cars, il leur faudra payer 100 livres (116 euros) par jour. Les taxis sont, eux, exemptés. A partir d’octobre 2021, le périmètre « ULEZ » sera étendu à l’ensemble de la ville.

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