"Non à la bétonisation de l’Estérel"... Des riverains s'opposent à la construction de 250 logements à Saint-Raphaël
Un projet immobilier de 250 logements devrait voir le jour en lieu et place de l’ancien camping Le mas du rastel, avenue du Gratadis. Le début des travaux d’une première phase de 125 logements est prévu pour le 1er semestre 2020. Photo Philippe Arnassan
Un collectif de riverains s’érige contre la construction de 250 logements au Gratadis, à Saint-Raphaël. Parmi leurs griefs, l’hydrologie et la saturation du quartier. Le maire défend un « bon programme »
Le projet immobilier de l’avenue du Gratadis, à Agay, fait de nouveau parler de lui. Après avoir été questionné par les membres du conseil de quartier en août dernier puis vivement critiqué par l’élu d’opposition Pierre Cordina lors du conseil municipal du 25 octobre, c’est au tour d’un collectif, le Comité de défense agathonien, de porter l’estocade à ce double programme de 250 logements, dont 40 % environ seront sociaux.
Depuis quelques semaines, ils sont une vingtaine de résidents du quartier à faire signer une pétition et à distribuer des tracts dans les boîtes aux lettres. Leur message est clair : « Non à la bétonisation de l’Estérel ».
Leur porte-parole, Olivier Isselin, détaille ce rejet : « Le premier problème dans ce dossier, c’est l’eau. Ce projet va ajouter à l’artificialisation des sols, alors même que cette zone est déjà touchée par les inondations. Ça a été le cas lors des dernières intempéries. C’est totalement inconscient. La construction prévoit bien d’être maintenue au-dessus d’une crue centennale... mais ça, c’est du passé. Et on est déjà à la limite. Ne faudrait-il pas prévoir l’avenir ? »
« La population va bondir de 50 % d’un seul coup »
Une vue du premier projet de 125 logements situé à l’angle de l’avenue du Gratadis et du chemin qui menait à l’entrée du camping. DR
Les griefs du collectif ne s’arrêtent pas là : « Une résidence au milieu d’un espace naturel, ça peut paraître tentant. Mais cet ensemble est dans la droite lignée des barres d’immeubles des années soixante... les couleurs en plus. En outre, c’est un cadeau empoisonné car il ne pourra pas y avoir d’extension à cet endroit. Les résidents se retrouveront enclavés, à devoir prendre leurs voitures pour aller dans les commerces d’Agay ou jusqu’à l’emploi, c’est-à-dire le centre-ville. Et ce alors que les routes sont déjà saturées. »
Pour le Comité de défense agathonien, ces logements n’ont tout simplement pas leur place à cet endroit : « D’un côté nous avons un village de 1 400 habitants, de l’autre un projet qui va augmenter sa population de 50 % d’un coup. Pourquoi Agay et l’Estérel devraient supporter cet effort ? Est-ce que les infrastructures sont en capacité d’accueillir cette croissance ? La moindre des choses aurait été d’organiser une concertation publique pour un projet de cette ampleur. Et pas simplement un conseil de quartier avec des personnes désignées et inféodées à la mairie. »
« Les habitants sont exaspérés du bétonnage »
Une insertion du projet dans son environnement, vu depuis l’avenue du Gratadis. Photo Ph. A
Olivier Isselin agite les nombreuses pages de pétition qu’il a fait signer dans les cafés et restaurants du quartier. Avec les autres opposants au projet, ils ont recueilli près de 2 000 signatures, selon ses dires. Également présente sur Internet, cette pétition a été « signée » électroniquement par plus de 1 500 personnes. Olivier, lui, en dispose de près de 200. Elles sont paraphées par des Agathoniens, des Raphaëlois, mais aussi des Fréjusiens ou encore des Roquebrunois.
« De nombreuses personnes viennent plonger, faire du VTT ou se promener à Agay et se sentent concernés. Faire un tri serait absurde, justifie-t-il. Je pense qu’il y a une vraie exaspération des habitants de la Cavem (Communauté d’agglomération Var-Estérel Méditerranée) quant à cet urbanisme non réfléchi et à ces maires bétonneurs. Alors toute personne qui souhaite signer parce qu’elle se sent concernée peut le faire. Moi je me sens bien concerné par les nouvelles constructions au tennis Galienni où près du Capitou. D’ailleurs, j’espère que notre comité pourra travailler avec les autres associations de défense de l’agglomération à l’avenir, car tout est lié. »
Selon le maire, « Les études montrent que l’hydrologie sera meilleure ensuite"
Le maire de Saint-Raphaël, Frédéric Masquelier. Photo doc. Dylan Meiffret
Au fait du vent de contestation qui souffle sur ce projet, le maire Frédéric Masquelier pointe du doigt des oppositions politiques opportunistes à quelques mois des élections municipales.
« Je pense qu’il faut distinguer les personnes directement concernées de celles qui ne le sont pas. Et Monsieur Isselin en fait partie. C’est un opposant qui n’a pas qualité à faire un recours en bonne et due forme. »
L’édile ne balaye pas pour autant les inquiétudes des riverains et a tenu à répondre point par point aux attaques formulées par le Comité de défense agathonien.
◗ Sur la concertation : « Ce projet n’est pas nouveau. En 2012, cette zone avait déjà été identifiée pour de l’urbanisation sur le dernier PLU. Et il y avait eu une enquête publique, de même qu’en 2018, lors de sa révision. Personne n’a rien trouvé à redire alors. Et pour cause, ce projet s’intègre parfaitement dans cette zone qui est, je tiens à le souligner, déjà aménagée ! »
◗ Sur l’hydrologie, Frédéric Masquelier rassure : « À cet endroit, les problèmes récemment observés n’ont rien à voir avec les débordements de l’Agay mais sont dus à du ruissellement. Or, ce permis a été soumis à une autorisation relative à la loi sur l’eau. J’ai, en plus, demandé des études complémentaires aux deux promoteurs. Il en ressort que l’hydrologie sera meilleure après, grâce à des bassins de rétention. Et s’il s’avérait nécessaire de réaliser des aménagements supplémentaires, notamment sur la route, nous procéderons bien entendu à des travaux. »
◗ Sur les infrastructures : « Ce projet et ses nouveaux habitants sont la garantie de faire vivre les commerces d’Agay mais aussi d’assurer la pérennisation des services publics comme l’école. Et concernant le trafic, c’est un faux problème. L’été, de nombreux touristes sont présents sans que personne ne s’en plaigne. »
◗ Sur l’acceptabilité du gain de population par le quartier : « Agay, comme les autres quartiers, a vocation à accueillir du logement. Et il y après de 500 demandes de logements sociaux en attente à Saint-Raphaël. En outre, la saisonnalité est un problème pour Agay, alors ces nouveaux arrivants vont sécuriser le commerce de proximité. » En résumé, « à partir du moment où toutes les études montrent que rien ne viendra aggraver le ruissellement et que ça ne porte atteinte à aucun riverain, c’est un bon projet pour le quartier. »