D'abord un peu d'historique est utile: du SIIVU Haute Siagne (1995) au SAGE Siagne (2019):
En 1995, le SIIVU Haute Siagne fut créé par les communes de Saint-Cézaire, Saint-Vallier, Escragnolles pour les Alpes-Maritimes (rive gauche) et les communes de Callian, Mons, Montauroux et Tanneron pour le Var (rive droite). L'objet social était la préservation et la mise en valeur du site.
En 2001, le SIIVU a intègré le réseau européen des sites protégés Natura 2000 ; le site était identifié pour la rareté des espèces sauvages animales et végétales et leurs habitats. Pour cela une brigade verte de 4 agents fut créée; ils étaient chargés de l'entretien de la ripisylve et des chemins d'ouvrages patrimoniaux - ponts, chapelles, lavoirs - et de l'information du public. C'était pour les communes une brigade environnementale.
En 2010, le SIIVU s'est vu demandé de s'intégrer au dispositif des "schémas d'aménagement et gestion des eaux" (SAGE) chargés d'assurer l'équilibre entre les prélèvements d'eau et la préservation des éco-systèmes. Le SIIVU a donc créé le SAGE de la Siagne et en est devenu le gestionnaire, organisme porteur. Pour rappel, les organismes qui prélèvaient de l'eau dans la Siagne étaient E2S aux sources de la Siagnole, la
société du Canal de Provence SCP au Lac de Saint-Cassien, la Régie des Eaux du Canal Belletrud à la source de la Pare, le SICASIL au Canal de la Siagne, EDF aux sources de la Siagne pour la centrale hydraulique haut de chute.
En 2018, le Préfet des Alpes Maritimes a demandé que le SAGE Siagne soit transféré au SMIAGE. C'était dans la logique du transfert aux communautés de communes de la compétence eau et assainissement: les lois NOTRe et GEMAPI attribuaient de manière obligatoire ces compétences aux EPCI à partir du 1/1/2020, ce qui impliquait la disparition des petits syndicats intercommunaux. Ce transfert est devenu effectif le 1/1/2019. Durant l'année 2019, le SMIAGE a missionné un ensemble de 2 cabinets d'étude pour mettre à jour les documents diagnostics précédents qui avaient été réalisés par le SIIVU.
Mais le SAGE Siagne est devenu un énorme vaisseau, comptant aujourd'hui 53 membres: 14 communes, 3 EPCI , des associations d'usagers et la région, les départements et les organismes de l'état.
Mes réflexions sur le diagnostic le plus récent du SAGE Siagne qui date de novembre 2019.
Je pense qu'il faut continuer de distinguer la gestion de l'eau au niveau des communes du pays de Fayence et le SAGE Siagne. Ce sont sont deux niveaux d'action différents.
En 1995 lors de la création du SIIVU, le sujet était la protection et la mise en valeur du site, alors que les communes géraient la distribution d'eau à leurs administrés.
Pour nos communes, la structure du réseau - après la fin d'E2S et le transfert de l'eau à la ComCom (*) - reste encore une séparation de la production d'eau brute: son transport, sa distribution aux réservoirs via un réseau (#90km) de conduites de gros diamètre; ensuite la distribution aux abonnés depuis les réservoirs après traitement chimique (par chloration), d'une eau potable via un réseau de conduites de petit diamètre (#500km).
(*) avant le transfert le 1/11/2019 à la ComCom, chaque commune gérait son réseau d'eau potable de manière indépendante. La mutualisation de tous les réseaux en une régie communautaire ne change pas la structure de ces réseaux et leur fonctionnement.
Le diagnostic SAGE Siagne de novembre 2019 - 1 an de travail suivant le passage du SIIVU au SMIAGE- reconnaît une bonne qualité de l'eau provenant des réserves karstiques. Mais les réserves karstiques sont très vulnérables aux pollutions. La première pollution possible est la turbidité; elle survient en cas de précipitations diluviennes à cause de l'entraînement de particules argileuses dans les inflitrations vers les karsts. Ces particules argileuses portent aussi les bactéries pathogènes. Comme nous n'avons pas de moyens de traitement de la turbidité (il faudrait une installation de traitement par filtration) , quand de tels épisodes surviennent, il faut attendre quelques jours que la décantation se produise dans les réservoirs et ne pas boire l'eau du robinet, ce que recommande l'ARS agence régionale de la santé (*). Encore que le traitement au chlore réduise les risques sanitaires.
(*) Lors du dernier épisode de turbidité, le littoral avait arrété les achats d'eau à E2S.
Concernant les risques de pollution de l'aquifère de la plaine de Fayence que le diagnostic mentionne, il faut dire que l'eau pompée est distribuée aux réservoirs des communes où elle est chlorée avant d'être distribuée aux abonnés et ses caractéristiques sont contrôlées et suivies régulièrement et transmises à l'ARS.
A mon sens c'est principalement le souci de la pérennité des sources de la Siagnole, des étiages d'été, de la sécheresse et du changement climatique qui devraient nous préoccuper; en relation avec l'urbanisation, les PLU le SCOT, et le nouvel objectif de limiter la croissance de la population à 0.4% en moyenne au lieu de 1.4%. Comment renverser la tendance passée qui se confirme après la situation COVID-19 que nous connaissons depuis 2020 et qui incite les citadins qui le peuvent à vouloir s'installer en zones rurales périphériques comme chez nous.
La villa individuelle, avec le barbecue et la piscine est le rêve d'une partie de la population française comme le montre le livre de Jérôme Fourquet et Jean-Laurent Cassely "la France sous nos yeux" Extraits.
La ressource de la Siagnole est encore là et le partage entre les communes du pays de Fayence et le littoral ne me paraît pas un problème. L'obligation de fournir de l'eau au littoral (Fréjus) est inscrite dans des décrets législatifs de 1870, 1891 et de 1928 non abrogés LIEN. Mais les conditions ont changé et le littoral a développé des ressources propres importantes dans la plaine de l'Argens, lesquelles sont complétées par le canal de Provence par la liaison Verdon-St Cassien. Il en résulte que le littoral ne prend que l'eau brute que nous ne consommons pas. Or aujourd'hui, nous ne consommons qu'environ 50% de l'eau brute produite en moyenne annuelle. Il y a donc de la marge mais sauf étiages et sécheresses.
En cas de tarissement sévère des sources de la Siagnole que faire?
- à court terme? des restrictions d'eau volontaires et/ou obligatoires par des coupures d'eau.
les restrictions volontaires résultent de la pédagogie et du civisme ou du prix de l'eau pour ceux qui y sont sensibles selon leurs revenus. Un tarif minimum pour les m3 vitaux (150l/jour et par personne) et un tarif très élevé au delà. Les restrictions volontaires passent par des économies d'eau: goutte à goutte pour les arrosages, et toutes les mesures préconisées dans les multiples sites... dont celui-ci https://bit.ly/3LrlPod - Et les fuites? le rendement du réseau Voir https://justpaste.it/8hkpw
- et à plus long terme? une utilisation inversée du réseau d'eau brute pour remonter de l'eau du lac St Cassien vers le répartiteur du Jas Neuf. Il s'agit de la conduite Sud qui fut réalisée en 2018. Cela impliquerait une station de pompage vers Fondurane, une adaptation de la conduite Sud (réversible pour pouvoir opérer dans les 2 sens), et une usine de traitement de la turbidité au Jas-Neuf.