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Gérald Darmanin, petits calculs et grandes ambitions

Par Solenn de Royer

 

Dans le sillage de son ex-mentor Nicolas Sarkozy, le ministre de l’intérieur veut faire de Beauvau un tremplin pour l’Elysée, alors que l’après-Macron a déjà commencé. Son activisme crispe l’aile gauche de la majorité, où certains lui reprochent un dangereux pas de deux avec l’extrême droite.

Le ventilateur tourne lentement. Il fait une chaleur moite sous le faré de la résidence du préfet, cachée derrière un rideau de palmiers, des ylangs-ylangs et des bougainvilliers. Au dernier jour de sa visite à Mayotte, mardi 23 août, Gérald Darmanin, barbe de trois jours et bras de chemise, prend un café avec ses collaborateurs, devant la mer turquoise. La conversation glisse sur la course de karting organisée fin juillet pour les détenus dans la cour de la prison de Fresnes (Val-de-Marne), qui fait polémique depuis trois jours. Le ministre de l’intérieur, qui n’a pas réagi en public mais hausse les yeux au ciel en privé, s’étonne que le sujet ait encore fait, la veille, l’ouverture des « 20 Heures ». « C’est le mois d’août, il n’y a rien dans l’actualité », tente d’expliquer un conseiller. Le ministre s’esclaffe : « Il n’y a rien… ! C’est sympa pour celui qui s’est décarcassé tout l’été ! »

Celui qui s’est « décarcassé », c’est lui. Alors que les ministres, retenus à Paris jusqu’au 5 août par une session parlementaire tardive, se sont dépêchés de partir en vacances, Gérald Darmanin en a profité pour se distinguer, on l’a vu partout. Au chevet des pompiers, à l’offensive contre les rodéos urbains ou les délinquants, cette « minorité d’emmerdeurs »(Journal du dimanche, le 21 août). Il a multiplié les annonces martiales, comme à Mayotte, où il a proposé de durcir l’attribution de la nationalité aux enfants d’étrangers nés sur l’île ou encore de créer des « lieux de redressement » pour les enfants délinquants, encadrés par des militaires. Ce qui a suscité un réel agacement dans les allées du pouvoir, où l’on juge que « Gérald », décidément, pousse toujours le bouchon trop loin.

 

« Surenchère d’annonces »

Furieux de voir le ministre de l’intérieur et des outre-mer fouler ses plates-bandes, le garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti, a aussitôt fait passer une note à Matignon pour recadrer le débat et montrer en quoi cette mesure était inapplicable pour des mineurs de moins de 13 ans. Même Emmanuel Macron, qui avait pourtant évoqué cette idée pendant la campagne, a jugé qu’il avait « dérapé » et a demandé à Elisabeth Borne, avec laquelle il a dîné mardi 23 août à l’Elysée, de le recadrer. La première ministre le recevra la semaine prochaine, à froid. Mais déjà, un sujet chasse l’autre. A peine rentré de Mayotte, M. Darmanin a annoncé qu’il se rendrait en Afrique de l’Ouest pour « anéantir » le trafic de crack, qui se répand à Paris. « Il s’inspire de ce qu’a fait Nicolas Sarkozy en 2002 et esquisse une stratégie pour 2027, observe le député Les Républicains (LR) des Alpes-Maritimes Eric Ciotti. Il est dans une surenchère d’annonces qui ne sont jamais véritablement suivies d’effets. C’est du Sarko dévalué. »

Vingt ans après Nicolas Sarkozy, qui fit de Beauvau un tremplin pour l’Elysée, Gérald Darmanin, qui marche dans ses pas (budget, intérieur), imprime en effet le même style décomplexé : dire « la vérité » aux Français, saturer l’espace médiatique et cliver, y compris avec du « gros rouge qui tache », comme s’en vantait l’ex-président en privé. L’intéressé assume sa proximité avec Sarkozy, dont il a dirigé la campagne de la primaire en 2016, avant de rejoindre la Macronie. Il continue d’aller consulter cette « oreille attentive » rue de Miromesnil, qu’ont désertée tant d’élus LR, déçus par le soutien apporté par leur vieux chef au président. « Ils finiront par exclure Nicolas Sarkozy, qui les a créés… ! », ironise-t-il. Lui dit qu’ « il y a toujours quelque chose à apprendre » de l’ancien président. « Même quand vous n’êtes pas d’accord, il vous fait réfléchir », confie-t-il au Monde, ajoutant qu’il se sent « comme un jeune joueur de football qui va discuter avec Zidane ou Platini ». « Ces types ont une expérience incroyable, vous savez bien qu’ils ne retourneront pas sur le terrain mais leurs coups francs, vous les regardez encore, quarante ans après. Il n’y a pas d’équivalent aujourd’hui. »

 

Pour beaucoup, l’activité estivale du ministre de l’intérieur est le signe qu’il organise sa précampagne, alors que l’après-Macron, affaibli par sa majorité relative à l’Assemblée nationale, a déjà commencé. A bientôt 40 ans, Gérald Darmanin ne semble pas vouloir passer son tour au prétexte qu’il aurait quinze ans de moins que ses principaux rivaux, Edouard Philippe et Bruno Le Maire. « Si c’était trop tôt pour moi, je n’aurais jamais été député à 29 ans… », glisse-t-il à ceux qui doutent que la présidentielle de 2027 soit le bon timing pour lui.


S’il ne redoute pas la concurrence de l’aile gauche de la majorité (Clément Beaune, Gabriel Attal…) – qu’il juge « embourgeoisés », selon un proche –, il est conscient que le créneau est très embouteillé à droite. Or, il a du retard sur M. Philippe, dont la popularité ne faiblit pas, et sur M. Le Maire, qui s’est distingué pendant la session parlementaire en faisant voter les deux textes budgétaires. « Ceux qui gagnent le Tour de France ne sont pas ceux qui étaient en tête au mont Ventoux, répète-t-il à ses proches. Il faut faire gaffe au type qui est dans la roue des trois ou quatre premiers. Ce sont les échappées qui sont belles ! »

 

L’intérieur, un tremplin ou un tombeau

C’est Edouard Philippe qui, en 2017, a présenté son ami « Gérald » à Macron. Ils ont souvent passé des vacances ensemble, en famille, et continuent parfois de déjeuner ensemble. Le ministre de l’économie, lui aussi, a fait partie de la bande du « Belotta-Belotta », du nom de ce restaurant parisien où ces ambitieux ex-LR, dont l’actuel conseiller du président, Thierry Solère, ou l’ami intime de Darmanin, le ministre des armées Sébastien Lecornu, aimaient se retrouver pour comploter. Désormais, chacun joue pour lui, tout en s’employant à relativiser, voire à nier, cette histoire commune : « il n’y a eu que deux déjeuners, la bande n’a jamais existé », a lancé Darmanin à un député qui l’interrogeait sur cette supposée épopée.


C’est sur le fond que Darmanin entend se distinguer de ses rivaux, qui partagent la même ligne « libérale, progressiste » tandis qu’il revendique, de son côté, une sensibilité « sociale et populaire », séguiniste. « Ce qui m’intéresse, c’est le débat d’idées », fait valoir celui qui rappelle être à présent le seul au gouvernement, « et peut-être même dans toute la majorité », à avoir voté contre le traité européen de 2005. Loin de l’ADN macroniste, il se sent proche de la « France du non », qu’il croit majoritaire. « Il est normal que des sensibilités s’expriment mais il faut qu’on soit tous assez intelligents pour comprendre qu’il est trop tôt pour le combat, nuance-t-il. Notre énergie doit être mise à la réussite du moment. »

Il sait que l’intérieur peut être un tremplin autant qu’un tombeau. Ses débuts au ministère, il y a deux ans, avaient été ternis par des accusations de viols, dont il vient d’être blanchi avec un non-lieu prononcé le 8 juillet. Dès septembre, il recevra les partis et les associations, avant un débat au Parlement sur l’immigration, pour préparer une loi prévue à la rentrée mais repoussée de plusieurs mois. Une autre, la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (LOPMI), sera examinée en octobre. L’organisation des JO de 2024 lui promet aussi quelques nuits blanches. Tout comme le suivi des statistiques de la délinquance, alors qu’une écrasante majorité de Français jugent très sévèrement le bilan du quinquennat sur le sujet. « Mon objectif principal est de faire baisser la délinquance, reconnaît-il. Ça passe par des moyens. On arrive au bout de ce réarmement, moral, humain et matériel. Maintenant, il faut obtenir des résultats. Ce n’est pas encore le cas, pas au point que ceux que je croise au café de Tourcoing [Nord] s’en soient totalement aperçus. »

 

Dangereux pas de deux avec le RN

Darmanin doit par ailleurs tenter de faire oublier les revers des dernières semaines : il a annoncé par erreur l’implication d’un étranger irrégulier dans l’agression de policiers à Lyon, fin juillet, et s’est fait retoquer par la justice, début août, l’arrêté d’expulsion de l’imam Iquioussen, réputé proche des Frères musulmans, avec lequel il a dîné en 2014, selon Mediapart. Son activisme, parfois brouillon, commence à lasser l’aile gauche de la majorité, où l’on se méfie de ce « bébé Sarkozy » qui a jadis travaillé pour le sulfureux député UMP du Nord Christian Vanneste, condamné pour homophobie, et a dit un jour que lui-même, comme maire, ne célébrerait pas de mariages entre personnes de même sexe. « Nous avons beaucoup de désaccords mais c’est très facile de travailler avec lui, il est dur mais franc », relativise le président de la commission des lois, Sacha Houlié, issu de la gauche. Ce dernier a déposé en août une proposition de loi visant à accorder le droit de vote aux étrangers aux municipales que le ministre de l’intérieur a aussitôt vilipendée. « Pour moi, être français, ce n’est pas pareil que de ne pas être français, argue-t-il.Je ne suis pas citoyen du monde, voyez, je viens de quelque part. »

Depuis son arrivée au ministère de l’intérieur, il y a deux ans, il se voit reprocher un dangereux pas de deux avec le Rassemblement national (RN). En 2020, il évoquait « l’ensauvagement » de la société. Cet été, dans le Journal du dimanche du 21 août, il relève que la moitié des gens interpellés pour actes de délinquance, à Paris ou à Marseille, sont des étrangers. Aux dernières questions au gouvernement, le 2 août, le député RN Sébastien Chenu et lui ont rivalisé d’amabilités dans l’hémicycle. L’élu du Nord fait part de son « soulagement » devant la décision d’expulsion de l’imam Iquioussen, et demande des détails. Du pain bénit pour le ministre de l’intérieur, qui précise avoir lui-même signé l’arrêté d’expulsion, le 29 juillet. « Dès que les policiers l’auront interpellé, il sera exclu du territoire », poursuit-il. Chenu se rassoit, satisfait : « J’ai envie de dire : au suivant ! » Darmanin reprend le micro : « J’ai envie, pour ma part, de vous inviter à voter des textes. Car c’est ainsi que nous obtenons des résultats. »


Son débat en février face à Marine Le Pen, à qui il a reproché sa « mollesse », continue de lui être reproché. Il assume : « C’est incroyable : il y a deux ans, on me fait ce reproche et aujourd’hui, on s’étonne que les députés RN mettent une cravate. Tout cela procédait d’une stratégie qu’il fallait dénoncer. » Il hausse les épaules, rappelle qu’on faisait le même procès à Sarkozy ou à Chirac « traité de facho pendant vingt ans ». « Il ne faut pas laisser l’électorat populaire seul avec le RN », insiste-t-il, persuadé que ce sera la clé de 2027. « Pour être élu, il ne faut pas être comme les gens, il faut penser comme eux », lui a souvent dit Nicolas Sarkozy, dont il admire l’intuition et le tempérament « animal ». « Darmanin est, dans le gouvernement Macron, la deuxième chance de Sarkozy, son exécuteur testamentaire, analyse le député socialiste des Landes Boris Vallaud. Il s’écrit un destin dans ses pas et ses obsessions. »

 

« Se faire respecter »

Le ministre de l’intérieur n’aime pas les critiques. Jusqu’à parfois nier l’évidence, comme il l’a fait au début de la polémique sur le Stade de France, mettant un temps infini à reconnaître des défaillances dans sa gestion de la finale de Ligue des champions, au risque d’apparaître arrogant et buté. Il n’hésite pas non plus à remettre les opportuns à leur place. A Mayotte, il reproche aux élus des incohérences ; pulvérise une représentante de la FCPE, qui lui explique que les Mahorais ne veulent pas d’une « assimilation culturelle, comme à l’époque coloniale » – il lui demande de retirer ses propos – ou fait taire un journaliste qui bavarde pendant son point presse. « Il peut être glaçant », raconte un parlementaire de Mayotte, désarçonné par ce sourire mécanique, ce visage « impassible », d’où rien ne transparaît.


Au lendemain des régionales, il en est presque venu aux mains avec Dupond-Moretti, avant un conseil des ministres. Le garde des sceaux, avec lequel il entretient des relations en dents de scie, lui reprochait d’avoir félicité son ami et mentor Xavier Bertrand pour sa victoire dans les Hauts-de-France contre la liste de la majorité sur laquelle figurait Eric Dupond-Moretti : « trahison », tonne l’ex-avocat. « Commence par gagner une élection ! », lui répond le ministre de l’intérieur. Il se justifie aujourd’hui : « Je n’aime pas qu’on me parle mal. Sans doute est-ce le reste d’une éducation populaire qui consiste à se faire respecter : on se permet avec nous des choses que les bourgeois ne se permettent pas entre eux. Et puis le rapport de force fait partie de la vie. Sinon on se fait bouffer. » En riant, il ajoute : « J’ai appris que si tu ne grilles pas la queue à la cantine de temps en temps, on ne te file pas de frites ! »

A chaque remaniement, il joue le bras de fer, menace de partir. Après les municipales de 2020, il veut imposer à Macron de rester maire – il a été largement réélu à Tourcoing –, alors que la règle édictée par l’exécutif ne permet pas le cumul. « Si vous me demandez de choisir entre ma mairie et le gouvernement, j’ai choisi. Surtout si c’est pour rester aux comptes publics… », dit-il au président, brandissant une « intéressante proposition dans le privé ». Macron cède, lui propose l’intérieur, tout en l’autorisant à rester maire (il démissionnera de son mandat quatre mois plus tard). Même chose en 2022. Désireux d’asseoir un leadership sur la majorité, il veut se présenter à la présidence de l’Assemblée nationale, Macron refuse. Mais il obtient de rester à Beauvau, avec un périmètre élargi, promu numéro 3 du gouvernement.

« Le plus pauvre » du gouvernement

Les débuts avec Elisabeth Borne, qui lui a reproché le Stade de France, ont été « complexes », reconnaît-il. Mais il assure que « ça va mieux ». « Nous nous sommes expliqués. Elle est cash et travailleuse. J’ai du respect pour elle », assure-t-il. Chaque bras de fer gagné permet à ce fils d’un tenancier de bar à Valenciennes et d’une femme de ménage, petit-fils d’un juif maltais et d’un tirailleur algérien, de dessiner la légende de celui à qui rien ne sera jamais donné. Devant les jeunes députés macronistes, il joue au vieux routier, raconte comment il a arraché aux barons sa circonscription, puis la présidence de la fédération UMP du Nord.

Il aime rappeler qu’il est « le plus pauvre » du gouvernement. Qu’il ne savait pas comment couper le fromage sur le plateau tendu, la première fois qu’il a déjeuné dans une préfecture. Qu’il connaît toutes les chansons de Renaud et Brassens par cœur mais qu’il parle mal anglais, contrairement aux « énarques », aux « bourgeois ». Il jure qu’il n’est pas animé par la revanche sociale. « Comme dans les Oiseaux de passage, de Jean Richepin, il y a des difficultés à être un canard sauvage plutôt qu’un canard d’élevage, dit-il crânement. Evidemment, ces derniers sont plus gros et plus tranquilles, personne ne vient les effrayer. Mais ils voient et font moins de choses intéressantes. Surtout, ils n’ont pas leur liberté. »


Libre, peut-être ; méthodique, certainement, notamment dans la construction de ses réseaux. Il est toujours le premier à souhaiter un bon anniversaire, s’inquiéter d’un parent malade ou envoyer un mot pour une défaite électorale. Même l’ancien président de l’Assemblée, Richard Ferrand, qui s’agaçait auprès d’« Emmanuel » des initiatives martiales de ce ministre si droitier, saluait son savoir-faire. « Il est quand même très sympa ce garçon, quelle énergie », convenait-il au printemps alors que son déjeuner, à l’hôtel de Lassay, venait d’être interrompu par un appel de « Gérald », qui lui proposait de venir dîner avec Dupond-Moretti, que Ferrand apprécie. Les jeunes élus macronistes adorent l’entendre raconter, autour d’un whisky, des anecdotes hilarantes sur Sarkozy, qu’il imite comme personne. Il a également reçu tous les nouveaux députés, au lendemain des législatives.

 

« Moins de visios, plus de bistrots »

Inconnu des Français il y a cinq ans, il est devenu incontournable au sein de la Macronie. Le futur patron de Renaissance, Stéphane Séjourné, lui a demandé de s’occuper de la formation au sein du parti. Il a dit oui, soulagé de constater que le député européen, formé au Parti socialiste (PS), a l’intention de revenir à une conception partisane plus classique, de chair et de sang, loin de la « start-up nation ». « Il y aura des cotisations, des élections internes, des débats d’idées, on aura le droit de ne pas être d’accord, se félicite Darmanin, qui n’avait pas trouvé sa place à La République en marche (LRM). J’étais dans le monde de Newton, on arrivait dans le monde d’Einstein. Tout était relatif… J’ai essayé de résumer cela dans une phrase – “moins de visios, plus de bistrots” – qu’on m’a longtemps reprochée. Maintenant, on me dit : “Tu avais raison.” »

Lui ne jure que par la proximité, le porte-à-porte : « Tout Tourcoing a mon portable ! » Les résultats des élections locales, calamiteuses pour LRM, ont validé ses intuitions. Aujourd’hui, il regrette que trop peu de ministres se soient risqués aux législatives. « Le président aime bien l’idée d’avoir de jeunes généraux sur le pont d’Arcole, qui vont au combat politique, ne se contentent pas de gérer, croit-il. Le pire, c’est quand les jeunes généraux deviennent maréchaux d’Empire, remplis de titres et de médailles, et ne prennent plus aucun risque pour lui. »

Alors que l’été s’achève, il lit partout qu’à ce rythme-là, il ne tiendra pas cinq ans. « C’est mal me connaître, rétorque-t-il. A Beauvau, il faut être dur au mal. » Au ministère, celui qui aime s’attarder devant la galerie de portraits de ses prédécesseurs a noté que la durée moyenne à ce poste n’excédait pas un an. « Le dernier qui a fait plus de trois ans, c’est-à-dire plus que Defferre, c’était Marcellin, c’était il y a quarante-cinq ans ! » Lui est le plus jeune ministre de l’intérieur sous la VRépublique. Il jure que si son ascension devait s’enrayer, il aurait une « deuxième vie ». « Ce que personne ne comprend, c’est que le jour où je suis devenu pour la première fois député, j’étais déjà comblé. J’étais déjà une anomalie statistique », dit-il. Contrairement à Nicolas Sarkozy, qui mimait parfois une aiguille dans le bras, la politique n’est pas une drogue. « Non, je ne suis pas comme ça »,affirme-t-il. Il s’arrête, se tait. « Enfin, j’espère… » Dans la résidence du préfet de Mayotte, le ventilateur continue sa ronde, hypnotique.