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varmatin.com par Guillaume Aubertin le 09/09/2017, à 09h09

 

Et si l’on plantait plus de vignes et d’oliviers pour limiter la propagation des incendies?

 

L'incendie qui s'est déclaré le week-end dernier à La Londe s'est arrêté aux portes du château du Galoupet. G.A.

La Région n’avait pas connu de feux de forêts aussi importants depuis 2003. Certains élus et chercheurs proposent de planter des espèces précises qui feraient office de coupe-feu, afin de limiter les dégâts causés par les incendies.

Même les docteurs le disent: il y a du bon dans la vigne. Si les spécialistes de la santé reconnaissent qu’un petit verre de vin de temps en temps peut être bénéfique pour la santé, certains élus de la région ont eux aussi tendance à promouvoir la culture du raisin sur leurs terres. C’est qu’en plus de donner du bon vin, les vignes pourraient faire office de coupe-feu en cas de gros incendie.

Les vignes,pare-feu efficace?

"L’intérêt principal de cette idée, cadre François Pimont, ingénieur de recherche à l’Inra, membre de l’équipe physique et écologie du feu, c’est de réduire la biomasse du combustible, car la garrigue a une puissance de feu très importante". Le chercheur met en évidence la particularité des forêts méditerranéennes qui sont composées principalement d’aiguilles, de feuilles, ou de rameaux fins. "C’est ce qui brûle le plus et libère beaucoup d’énergie au moment du passage du feu", précise le spécialiste.

"Si l’on remplace la végétation naturelle par des vignes ou des vergers bien désherbés, ça créera des zones dans lesquelles la propagation du feu sera moins intense".

"Pour limiter la progression du feu, résume François Pimont, il faut réduire cette biomasse combustible en la rendant discontinue dans l’espace". Sans carburant, le feu ne progresse plus. "Si l’on remplace la végétation naturelle par des vignes ou des vergers bien désherbés, ça créera des zones dans lesquelles la propagation du feu sera moins intense".

L'incendie d'Artigues, qui s'est déclaré le 24 juillet dernier, a ravagé près de 1700 hectares de garrigue. G.A.

Puis, comme le rappelle l’ingénieur de l’Inra, "le passage d’un front de feu, c’est un stress très ponctuel qui ne dure qu’une à deux minutes". Autrement dit, le cep de vigne n’a pas vraiment le temps de brûler. Surtout s’il est bien entretenu. Ce n’est pas pour rien que 200 hectares de vignes avaient été plantées dans chacune des quatre plaines de l’île de Porquerolles, il y a près d’un siècle.

Aujourd’hui, il n’en reste plus que 80 hectares répartis sur trois domaines mais leur fonction seconde est toujours d’actualité. Comme le fait remarquer Florent Audibert, directeur et oenologue au domaine de la Courtade, "les agriculteurs sont aussi ceux qui dessinent le paysage. On sait que notre activité ne sert pas qu’à faire du vin. La lutte contre les incendies en fait clairement partie".

Et pourquoi pas des chênes verts des châtaigniers?

D’autres espèces peuvent aussi faire office de coupe-feu. Comme les plantations de chênes verts ou blancs truffés: "En général, ils sont bien entretenus car les propriétaires ont les moyens d’entretenir leurs sous-bois et donc il y a peu de litière au sol", détaille François Pimont. Pareil pour les châtaigniers qui ont "peu de sous-bois et sont connus pour ne pas brûler très fort".

"Les oliviers sont plus hauts que les ceps et donc le vent au sol est beaucoup plus faible."

D’autres préfèrent aussi miser sur les oliveraies. Leur avantage? "les oliviers sont plus hauts que les ceps et donc le vent au sol est beaucoup plus faible", ce qui permet de ralentir la propagation des flammes.

Il y a un siècle, 200 hectares de vignes avaient été plantés sur l'île de Porquerolles. G.A.

Créer une zone test entre Bormes et La Londe

A La Londe et à Bormes-les-Mimosas, où plus de 2.000 hectares de forêt ont brûlé cet été sur l’ensemble des deux communes, on n’écarte aucune piste afin de trouver des solutions pour combattre ces feux dévastateurs. Transformer une partie de ces zones forestières en zone agricole? C’est ce que propose François de Canson, le maire de La Londe, où 460 hectares de forêt sont partis en fumée le week-end dernier.

"Avec des vignes et des oliveraies, cela coûterait bien moins cher que de dépenser des millions dans le débroussaillement"

Son projet, en concertation avec la commune borméenne, vise d’abord à rassembler les instances concernées afin "d’analyser le parcours du feu et trouver des propriétaires agricoles qui créeraient une zone test en plantant des vignes et des oliveraies sur des secteurs très précis"Lui estime que "cela coûterait bien moins cher plutôt que de dépenser des millions dans le débroussaillement". Mais tout n’est pas si simple. "Il faut déjà qu’on ait l’autorisation de l’Etat pour déclasser ces zones naturelles en zones agricoles", tempère François Arizzi, le maire de Bormes.

Le quartier du bas-Pansard à La Londe a été ravagé par les flammes. G.A.

Le débroussaillement, règle numéro 1

Un mois et demi après l'incendie de Bormes (1.700 hectares), les services communaux s’attachent pour l'heure à étudier le terrain*. "On fait le constat de ce qui a brûlé, de ce qui a été perdu, on regarde au cas par cas où le feu est passé, où il s’est arrêté, pour en tirer toutes les conséquences. Et après, poursuit François Arizzi, on regardera comment on peut utiliser les terres. Car derrière, il faut qu’il y ait une exploitation viable, sinon ça ne sert à rien".

Enfin, comme tient toutefois à le rappeler François Pimont, "toutes ces mesures ne seront jamais suffisantes pour arrêter le feu. Ce serait illusoire de penser que quelques vignes régleront le tout. La présence des services de lutte sera toujours indispensable". Et le chercheur d’insister sur "l’importance du débroussaillement, la règle numéro un à respecter quoi qu’il arrive, condition sine qua non pour une intervention des services de lutte dans de bonnes conditions".

*Une grande réunion d‘information publique se tiendra sur le sujet à la salle Bormisport de Bormes-les-Mimosas le 28 septembre à 18 heures.