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Législatives - Éric Woerth : "Ne vous laissez pas manipuler et piéger"
Jérôme Béglé

 

Ministre du Budget puis du Travail de 2007 à 2010, Éric Woerth fut la cheville ouvrière du programme du candidat Sarkozy durant la primaire de la droite et du centre. Sa parfaite connaissance des mécanismes budgétaires et de l'entrelacs législatif de notre pays lui a permis d'être associé de près à la campagne de François Fillon. Maire de Chantilly depuis 22 ans, Woerth est candidat à sa réélection au fauteuil de député de la quatrième circonscription de l'Oise. La République en marche a peiné à lui trouver un candidat, mais après deux désistements, c'est finalement Stéphanie Lozano, longtemps encartée socialiste et collaboratrice de l'ancienne ministre Laurence Rossignol, qui a accepté de relever le gant.

À quelques jours du premier tour, le résultat est incertain tant les sondages semblent favorables au parti du président Macron. Mais loin de se laisser aller à l'unanimisme ambiant, Éric Woerth insiste sur les différences qui le séparent de son adversaire. Il précise ce que doit être le rôle à l'Assemblée nationale d'un parti d'opposition qui doit faire entendre sa voix sans polémiquer sans cesse avec le gouvernement.

Le Point.fr : Un mois après l'élection présidentielle, qu'est-ce qui différencie encore un candidat LR d'un candidat REM ?

Éric Woerth : D'un côté, vous avez des candidats REM qui se disent ni de gauche ni de droite. Des candidats qui, en grande majorité, ont fui le Parti socialiste pour rejoindre de manière opportuniste les rangs de La République en marche. Des candidats qui voteront un programme de hausses massives des impôts, d'augmentation de 20 % de la CSG et de baisse du pouvoir d'achat des retraités et des professions libérales. Et de l'autre, vous avez des candidats LR et UDI qui défendent les valeurs de la droite et du centre qui n'ont pas disparu avec l'élection présidentielle, qui se battent pour un programme clair et puissant de réformes, qui croient à l'entreprise, à la famille, qui veulent restaurer l'autorité et l'identité de la France, qui veulent rompre avec la spirale infernale de la dette et du chômage.

Que dites-vous aux électeurs de droite déboussolés, qui sont prêts à voter pour Stéphanie Lozano candidate de La République en marche ?

Soixante-quinze pour cent des candidats de La République en marche sont issus de la gauche. C'est le cas des candidats de l'Oise. Dans ma circonscription, mon opposante REM est une candidate du PS, ancienne collaboratrice au cabinet de Laurence Rossignol, ministre socialiste de François Hollande. Comment tenter de faire du neuf avec du vieux… C'est la gauche honteuse, celle qui pense qu'un simple recyclage des étiquettes permet le recyclage des idées. Je veux dénoncer cette hypocrisie qui conduirait à une majorité de bric et de broc, dont les membres retourneront au moindre coup de vent à leurs amours d'origine… Je dis aux électeurs de droite : ne vous laissez pas manipuler et piéger. Vous voulez vraiment réformer ? Alors donnez à notre pays une majorité de droite et du centre, solide et stable, une majorité qui correspond à vos idées et à vos valeurs. Je demande aussi aux électeurs de droite : voulez-vous vraiment reconduire une majorité socialiste à l'Assemblée nationale ?

Élu député, quelle serait votre attitude à l'égard de la majorité présidentielle ?

Je veux d'abord dire qu'une majorité La République en marche, si elle devait être écrasante, écraserait tout autour d'elle, les débats nécessaires, la diversité d'opinions, les valeurs de la droite. Paradoxalement, elle ne renforcerait pas le chef de l'État mais l'affaiblirait. Si le parti du président avait la majorité, alors je serais clairement dans l'opposition, mais une opposition constructive. La démocratie a besoin d'équilibre des pouvoirs et de débat, sinon elle s'affaiblit au risque de se perdre dans les aventures extrémistes. Je veux par-dessus tout la réussite de la France. Et réussir, c'est réformer ! Je soutiendrai tous les projets qui iront dans le sens du renforcement de la sécurité des Français, de la lutte contre le chômage de masse, de la libéralisation de l'économie, de la baisse des impôts, des charges et des dépenses publiques, du progrès social, de la famille et de la responsabilisation de notre société !

L'élu local a-t-il encore un rôle à jouer dans une France centralisée et tournée vers l'Europe ?

Plus que jamais ! Tout montre que le nouveau gouvernement veut recentraliser les pouvoirs. Volonté de créer un parti unique, de mettre sous tutelle les collectivités locales, de niveler les esprits et les débats ! Je pense pour ma part qu'une démocratie vivante passe par les territoires notamment ruraux qui sont les oubliés de la République, que les élus locaux grâce à leur dévouement quotidien sont les seuls vrais repères dans une France déboussolée. La France a besoin de l'Europe, d'une Europe remodelée, plus transparente et plus efficace, plus compréhensible. Mais la France a aussi besoin de ses territoires et de leur diversité. Pour les développer, outre la croissance économique, nous devrons lutter contre l'excès de bureaucratie et le poids des normes qui paralysent notre pays. L'uniformité ne peut pas être la règle. Nous permettrons l'ajustement des normes aux réalités des territoires en donnant un pouvoir d'adaptation aux acteurs locaux. Les élus locaux sont les seuls à pouvoir jouer le rôle indispensable de médiation entre les populations et les pouvoirs publics.