Fillon au défi de clarifier son projet, sans se renier | À la Une | Reuters
François Fillon, dont le dispositif de campagne devrait être dévoilé en partie cette semaine, s'efforcera de déminer le dossier de la protection sociale qui divise jusque dans ses rangs et cristallise les attaques de ses rivaux pour la présidentielle.
Discret depuis sa victoire à la primaire de la droite et du centre, l'ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy, qui était dimanche dans la Sarthe pour rendre hommage à son ancien mentor Joël Le Theule, devrait notamment s'expliquer mardi devant le groupe Les Républicains à l'Assemblée, où les premières notes discordantes ont percé mardi dernier, a-t-on dit à Reuters de sources parlementaires.
Plusieurs députés LR se sont fait l'écho de l'inquiétude de leurs électeurs mais aussi de leurs propres interrogations sur le projet de réforme de l'assurance maladie porté par François Fillon et pilonné par la gauche et le Front national.
"Au sein du groupe, personne ne traîne des pieds, tout le monde est d'accord pour dégager la gauche et faire en sorte que Marine Le Pen ne gagne pas, mais sur le social, Fillon a compris le message", rapporte un élu.
"Cela dit, c'est son programme et on ne change pas un programme comme ça quand on l'a soumis aux électeurs de la primaire", ajoute-t-il.
90% DES FRANÇAIS CONTRE UNE BAISSE DES DÉPENSES DE SANTÉ
L'exercice est en effet périlleux pour le Sarthois qui répétait encore le 6 décembre devant les parlementaires LR qu'il resterait sur sa "ligne politique" et son "cap". "Ça n’est pas en zigzaguant qu’on convainc et ça n’est pas en négociant des compromis qu’on va redresser la France", a-t-il déclaré.
Selon un sondage Elabe publié cette semaine, 90% des Français jugent inacceptable une baisse des dépenses publiques en matière de santé et 58% considèrent que la proposition de François Fillon de supprimer 500.000 postes de fonctionnaires sur cinq ans "n'est pas souhaitable".
Jugeant son projet "caricaturé", le candidat de la droite et du centre devrait clarifier prochainement ses propositions sans rien renier du fond de ses engagements, a fait savoir l'un de ses proches, le sénateur LR Bruno Retailleau.
"Il indiquera de façon beaucoup plus déliée, de façon encore plus précise, ce qu'est son projet pour la Sécurité sociale", a-t-il dit sur RTL.
Pas de recul, mais un effort de pédagogie, assure-t-on dans l'entourage du candidat, qui a martelé durant la campagne de la primaire qu'il n'amenderait jamais son projet.
"ON PEUT MODIFIER DES CHOSES"
L'ancien ministre Eric Woerth, ex-soutien de Nicolas Sarkozy et l'un des artisans du projet présidentiel de la droite, a mis les pieds dans le plat dimanche en estimant que la répartition entre "petits risques" et "gros risques", coeur du projet de François Fillon pour l'assurance maladie, n'était pas "la bonne mesure".
Dans son programme, François Fillon propose de "focaliser l’assurance publique universelle notamment sur les affections graves ou de longue durée, le panier de soins solidaire, et l’assurance privée sur le reste, le panier de soin individuel".
"Les moins favorisés ne pouvant accéder à l’assurance privée bénéficieront d’un régime spécial de couverture accrue. Les patients seront responsabilisés par l’introduction d’une franchise maladie universelle dans la limite d’un seuil et d’un plafond", peut-on lire.
"Ça a été écrit à un moment donné dans le projet de la primaire, je pense qu'il faut aller plus loin que ça, on peut modifier des choses", a dit Eric Woerth au "Grand Rendez-vous" Europe 1-Le Echos-iTELE.
"Il faut clarifier la répartition entre les mutuelles et la Sécurité sociale. (...) Il faut éviter les déremboursements, il faut éclaircir ce qui doit être remboursé et qui doit le rembourser", a-t-il avancé.
Le député a ajouté que la réforme de l'assurance maladie n'était pas une priorité pour les mois de juillet et août 2017, si François Fillon venait à remporter la présidentielle, et que les textes ne seraient pas écrits "avant".
Dans son livre-programme "Faire", paru en 2015, François Fillon précise qu'il procédera "par ordre et avec mesure" et n'inclut pas la réforme de l'assurance maladie dans la "dizaine de mesures" (abrogation des 35 heures dans le secteur privé, âge de départ à la retraite porté à 65 ans, réforme fiscale, etc.) qu'il entend mettre en oeuvre "entre juin et septembre".
"La Sécurité sociale que les Français connaissent, elle va continuer à exister, c'est bien ce que veut François Fillon", a assuré Eric Woerth.
Source: fr.reuters.com (Sophie Louet avec Emile Picy) © Thomson Reuters 2016 Tous droits réservés.