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Problèmes de riches

pâr David Barroux les Echos

 

Il devrait exister une échelle de Richter des soucis que peuvent rencontrer les entreprises. Car dans le monde des affaires, tous les problèmes ne se valent pas. Il y a ceux qui peuvent aller jusqu'à causer la disparition d'un groupe. Et il y a ceux qui sont avant tout des problèmes de riches. Apple et Airbus, qui ont annoncé cette semaine des résultats en demi-teinte, appartiennent au second groupe : celui dans lequel ce n'est pas parce que l'on va un peu moins bien que l'on va forcément mal. Certes, Apple affiche pour la première fois en quinze ans une baisse de son chiffre d'affaires. Il faudrait être de mauvaise foi pour estimer qu'il s'agit d'une bonne nouvelle. Airbus a, lui, publié un chiffre d'affaires trimestriel en très léger recul et un effondrement de son bénéfice net. Même si cette baisse de régime s'explique en partie par des éléments exceptionnels, personne ne peut nier que les indicateurs instantanés de l'avionneur européen sont mal orientés.

Au-delà des jugements immédiats et des sanctions boursières, il convient toutefois de relativiser les passages à vide d'une bonne partie des multinationales qui, à l'image d'Airbus ou d'Apple, ont su s'imposer au sommet de leur industrie. Le premier dispose d'un gigantesque réservoir de presque 7.000 commandes d'avions (plus de sept années de travail). Le second vient de lancer un nouvel iPhone 7, qui en dépit de son prix a réalisé un excellent démarrage, et le chiffre d'affaires du groupe, qui reste la première capitalisation boursière de la planète, a bondi de pratiquement 200 milliards de dollars en dix ans pour atteindre les 215 milliards. La vérité est que le monde de l'industrie n'est pas linéaire. Au-delà des inévitables à-coups conjoncturels, les entreprises doivent faire face à des « cycles produit ». Il faut non seulement être capable de se réinventer, mais également de faire monter en puissance de nouvelles activités. Il s'agit d'un double challenge que toutes les entreprises ne sont pas capables de relever sur la durée. Il arrive donc que des entreprises trébuchent, qu'elles se restructurent pour rester compétitives ou qu'au pire elles ratent une évolution majeure et soient ringardisées. Mais même si les start-up exercent une incroyable fascination, si Uber, Airbnb ou Facebook sont de nouveaux géants, il convient d'admettre que les multinationales font aussi preuve d'une incroyable capacité de résistance. Il y aura bien sûr des exceptions, mais les colosses semblent même se renforcer. L'accélération technologique, la mondialisation, l'importance croissante de pouvoir s'appuyer sur une base installée créent des barrières à l'entrée de plus en plus élevées dans bien des secteurs. Surtout, les milliards de profits qu'engrangent les multinationales sont des armes redoutables pour acheter de la croissance et éliminer des concurrents potentiels en jouant la carte des OPA. ATT veut ainsi s'offrir un avenir plus souriant avec Time Warner. Et les 236 milliards de dollars de cash d'Apple permettent aussi de relativiser la contre-performance du dernier exercice d'un géant qui est loin d'être à court d'idées comme de munitions.

 

Source: lesechos.fr