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En France, la réglementation en matière d'affichage est bafouée

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L'association Paysages de France lutte contre la pollution visuelle en milieux urbain et non urbain et pour la préservation des paysages. Décryptage de la problématique de l'affichage publicitaire par son président, Pierre-Jean Delahousse.

En quoi diriez-vous que l'affichage est un enfeu pour les territoires ?



Les panneaux publicitaires sont souvent responsables d'une pollution visuelle considérable. Le constat reste le même depuis maintenant plusieurs décennies ; il est particulièrement sombre dans les entrées de ville dont beaucoup sont défigurées par les tristement célèbres «4x3 », les panneaux scellés au sol qui jalonnent tous les axes pénétrant nos centres urbains. Les paysages et les identités territoriales continuent de se dégrader alors que ce constat fait depuis longtemps l'objet d'un consensus apparent, y compris dans la classe politique. Le législateur a reconnu que les enseignes et publicités portaient atteinte à l'environnement et au cadre de vie. Les textes régissant l'affichage publicitaire, les enseignes et les pré-enseignes figurent dans le livre V du Code de l'environnement, lequel s'intitule Prévention des pollutions, des risques et des nuisances ». Or on ne peut que constater un large hiatus entre cette conception introduite dans la loi et sa traduction concrète dans les territoires. Le plus choquant est que la réglementation applicable en matière d'affichage et de publicité est bafouée en France; cette atteinte au cadre légal s'opère même à très grande échelle.



A quoi serait due l'insuffisance de contrôle ?



Paysages de France relève quotidiennement des infractions massives à la réglementation et les dénonce. Nous avons par exemple fait retirer 300 panneaux au sein du parc naturel régional du Haut-Languedoc. Mais les procédures sont longues et nous observons que les pouvoirs publics locaux ont souvent tendance à laisser faire plutôt qu'à faire respecter la réglementation. Il est vrai que celle-ci est devenue très complexe (du fait notamment de son élaboration sous influence de nombreux groupes d'intérêts catégoriels) mais la regrettable technicité de notre sujet n'est pas la cause de cette pollution visuelle. Les pouvoirs publics s'inclinent trop souvent devant les acteurs économiques. Certains maires préfèrent fermer les yeux lorsque le panneau est installé chez un électeur et percevoir la taxe locale sur la publicité et les enseignes (TLPE). L'image de la France est un atout éconoInique majeur : nous lui portons atteinte en ne faisant pas respecter notre cadre légal. C'est pourquoi nous attendons des élus locaux qu'ils prennent leurs pleines responsabilités à la fois dans l'adaptation à leur territoire des règles nationales (à travers le RLP) et dans leur application stricte. Leur engagement est particulièrement attendu en dehors des lieux exceptionnels (abords des monuments historiques, sites classés...) sur lesquels la loi permet une protection dans l'ensemble efficace.

Aujourd'hui, un projet de décret, «écrit» par les afficheurs et soutenu par Bercy, menace très gravement notre patrimoine collectif. Principale cible : les unités urbaines de moins de 1(X) 000 habitants, avec la possibilité d'installer des dizaines de milliers de 4x3 scellés au sol dans des communes où ils sont interdits depuis toujours! Mais ce n'est pas tout : ce projet propose même de modifier la façon de calculer la surface des panneaux, qu'il s'agisse de publicités ou d'enseignes. Résultat : des panneaux plus grands et donc plus polluants dans toutes les communes de France! Si par malheur nous ne parvenions pas à empêcher la signature de ce projet honteux, ce serait plus que jamais aux élus de défendre, au niveau communal et intercommunal, le cadre de vie des populations ainsi que l'identité et l'image de leurs territoires.

Propos recueillis par Philippe Schmit AdCF Assemblée des communautés de France Bulletin No205 décembre 2015

Voir le dossier Affichage publicitaire du Numéro 205 de l'AdCF décembre 2015

Et voir ici le point de vue de Stéphane Dottelonde président de l'Union de la publicité extérieure. Les panneaux publicitaires sont un enjeu économique.