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Projet de loi contre les fake news

 

 

Prends bien soin que se diffuse concernant tes concurrents une rumeur infamante de crime, d'immoralité ou de corruption accordée à leurs mœurs», recommandait Quintus Cicéron dans son Petit manuel de campagne électorale. C'était il y a deux mille ans. 

Depuis, le mensonge et la propagande continuent d'accompagner la politique, mais, sur le continent numérique, terre de l'immédiateté, de la compulsion et de l'hyperbole, ils prennent des proportions délirantes. Réputations brisées, calomnies relayées, images trafiquées, les possibilités de manipulation des esprits sont sans limite.

Pour les réduire, le gouvernement a élaboré une loi de circonstance qui prétend trier le bon grain de l'information de l'ivraie des fausses nouvelles. Un texte complexe, probablement inopérant, préoccupant par endroits et qui déjà réveille la passion française de la liberté.

Plutôt que de promouvoir l'éducation, la culture, la distance, le silence, le discernement, tout ce qui permet de penser et donc de déjouer les «fake news», le projet de loi veut faire appel au juge.

 Le journalisme et les vérités officielles n'ont jamais fait bon ménage, et toute intrusion dans le magnifique premier article de la loi de 1881 sur la presse - «L'imprimerie et la librairie sont libres» - ramène à la vitesse de l'éclair au «Miniver», le ministère de la Vérité dans la novlangue de 1984…

Ce texte, en outre, oublie le véritable péril. On pourrait l'appeler: «siliconisation de l'information».

Cette mainmise des grands groupes californiens,les fameux Gafa, qui ne se soucient ni de la vérité ni du mensonge, mais simplement de l'audience. Pour l'atteindre, ces plateformes (qui vivent hors du droit fiscal et du droit commun) mêlent les articles de journaux et les bouteillons insanes pour s'emparer de la quasi-intégralité du marché publicitaire et tuer à terme les médias traditionnels. Si rien n'est fait, dans vingt ans nous subirons le partage de l'information entre la côte ouest américaine, l'Arabie saoudite, la Chine ou la Russie.