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Hypermarchés : vous n'irez plus faire vos courses de la même façon

Comme la nature, le commerce a horreur du vide. L’an dernier à la même époque, lors de la divulgation de leurs résultats annuels, les groupes majeurs de la grande distribution à la française : Casino, Carrefour, et Auchan, avouaient à demi mot que les hypermarchés qui avaient fait leur fortune et leur renommée dans les années 1960 n’avaient plus vraiment la cote. Aujourd’hui, l’heure n’est plus au constat mais à l’action. Le modèle de l’hyper à la papa avec ses télés en promos et ses parkings géants est bel et bien enterré. Place au divertissement, au renouveau de l’expérience client, voire carrément, c’est le choix de Casino, à la réduction drastique des surfaces de vente.

Le digital est passé par là…

Le coup de grâce est venu de Georges Plassat, le 9 mars, à Paris, au pavillon Gabriel. Sur le départ, le charismatique PDG de Carrefour a commencé moderato :

"Carrefour reste un pionnier de la distribution moderne. Beaucoup de choses se sont passées depuis l’ouverture du premier hypermarché en 1962 jusqu’à l’entreprise multi-format d’aujourd’hui."

Puis il continue, plus précis : "La part de l’hyper se réduit mais reste un des éléments fondateurs de l’entreprise".

Avant d’évoquer "des chiffres qui parlent d’eux-mêmes : les clients multi-formats dépensent 1,8 fois plus qu’un client d’hyper".

Et de porter l’estocade finale :

"Avec le multi-format, la gravité du groupe se déplace. On passe de l’hyper : "tout sous le même toit" à " tous sous le même toit".

Une révolution ! Le digital est passé par là… Pas question de jeter l’électroménager aux orties. Mais quand même... La part du non alimentaire, qui faisait la marque de fabrique de ces temples de la consommation moderne, se réduit d’année en année : 83 % du chiffre d’affaire du groupe est aujourd’hui réalisé en alimentaire contre 80 % en 2011.

"Il faut que nous reprenions la parole en alimentaire", a donc insisté Georges Plassat, en réaffirmant l’expertise du groupe dans les métiers du frais. Pour lui pas question, comme certains de ses concurrents le font (Casino pour ne pas le nommer) de diminuer les surfaces de vente. En revanche, "l’hyper va se resserrer pour libérer des surfaces de confort et devenir un lieu de vie", dit-il. Place à la restauration - version simplissime et fait maison - avec du "gourmet traiteur très abordable", de la sandwicherie, du couscous... Et place à l’imagination : pourquoi ne pas insérer des surface de sport ou des surfaces éducatives… dans ses mastodontes ? Un magasin comme celui de Villiers-en-Bière - 24 000 m2- s’y prête tout à fait.

Diminuer les surfaces chez Casino

Du 20.000 m2, Jean Charles Naouri, le président de Casino, n’en a pas en stock et n’en veut surtout pas. Le patron de l’enseigne stéphanoise a entrepris depuis quelques années de diminuer les surfaces de ses hypers au profit de ses galeries commerciales et s’en porte très bien.

"Sur Géant, les mètres carré ont été réduits mais cela n’a pas empêché la croissance des ventes. Le chiffre d’affaire au mètre carré est en croissance de 3% sur ce format", fanfaronne t-il.

De fait, ses hypermarchés (avec les supermarchés) tirent la croissance du groupe en France. Comme chez Carrefour, l’alimentation est au centre du nouveau concept "Géant" avec un "espace marché" dès l’entrée du magasin et des corners de restauration en test à Amiens et Nîmes et bientôt à Monthieux (près de Saint-Etienne), Quimper, Niort, Toulouse Fenouillet et Anglet.

Pour le non-alimentaire, Jean-Charles Naouri, qui possède aussi CDiscount, est plus catégorique : exit le gros électroménager, les télévisons, le multimédia, "des familles de produits où la concurrence avec internet est forte". Mais le textile, le linge de maison (notamment en marque propre) ont toute leur place dans ses magasins revisités. Et pour faire le lien avec le e-commerce, les hypermarchés "Géant" aménageront des corners CDiscount. Rien ne se perd…

Auchan prend son temps...

De son côté, Auchan annonçait ce vendredi de mauvais résultats sur la partie vente au détail en France, plombée, là aussi, par les hypermarchés. Mais pas d'affolement, l'enseigne nordiste réalise 65 % de son chiffre d'affaires (51,718 milliards en 2016) à l'international et n'a pas de compte à rendre à des actionnaires. Le groupe remodèle entièrement son offre commerciale et prend son temps.

"L’hyper en 2025 ne s’appellera peut-être plus hypermarché. On est en recherche de développement", lâche le patron de la holding, Wilhelm Hubner. "Le net rebat les cartes de l’expérience client", ajoute-t-il. Mais, prenant l’exemple de la Chine, où le groupe est très implanté, le président du directoire pense que ce serait une erreur d’arrêter de vendre de l’électroménager dans ses hypers :

"En Chine, 70 % du petit électroménager est vendu sur le net mais 30 % du gros est vendu en magasin physique. Les gens veulent de l’expérience d’achat."

Sur la partie alimentaire, Wilhelm Hubner est toutefois en phase avec ses concurrents : "Demain, nos chefs de secteurs produits frais dans nos magasins seront des chefs. Les clients viendront manger dans nos restaurants. C’est normal car nous avons de la place !", affirme-t-il sans dévoiler dans le détail sa stratégie. Rendez-vous est pris pour l'année prochaine...

Source: tempsreel.nouvelobs.com Corinne Bouchouchi