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Il se fait ces temps-ci en France grand usage de « je ». Les candidats, n'ont que ce mot à la bouche.


Je ferai ceci, j'abrogerai cela. J'augmenterai le smic, je baisserai les impôts, je refonderai l'Union européenne, je marcherai sur l'eau, je changerai le plomb en or...


Une seule forme: la première personne du singulier. Un seul temps: le futur.


Le Roi Soleil était plus modeste. Tous tout-puissants (y compris ceux qui ne cessent par ailleurs de dénoncer les méfaits de l'hyperprésidence). Comme s'il n'y avait qu'à décréter. Comme si la France était une page blanche et les années à venir, une ardoise magique où il suffit de lister ses projets pour qu'ils se réalisent.  Les prétendants à l'Elysée n'oublient qu'une chose, oh, un simple détail: c'est que pour mettre ce programme en œuvre, il faut avoir une majorité et un gouvernement disposés à l'appliquer. Sur ce chapitre — pas celui du «que faire»?, mais celui du «comment faire?» —, on ne les entend pas. Comme si la chose allait de soi: avec l'instauration du quinquennat, les législatives seraient une formalité. Il suffirait de gagner la présidentielle pour disposer derrière d'une majorité parlementaire automatique. Eh bien, c'est très loin d'être évident. Ce ne l'était pas hier: Hollande n'a pas réussi à rassembler durablement, ni dans le pays, ni à l'Assemblée, ni au gouvernement, les forces qui avaient concouru à son élection. Ce fut un de ses grands échecs. Il sera encore plus difficile — voire impossible — pour le futur président d'avoir une majorité à sa main. Pour la bonne raison que la France n'est plus coupée en deux, ni même en trois, comme on le dit, mais en quatre.

La recette du quatre-quarts français, c'est: La gauche de la gauche, allant du PC aux frondeurs du PS, aujourd'hui partagés entre Mélenchon et Hamon.


Le centre gauche. Usé par les années Hollande, il a été battu à la primaire mais n'a pas pour autant disparu du paysage, une grande partie
de ses électeurs s'étant tournés nés vers Macron.

La droite classique, UDI et Républicains, qui pèse plus lourd que ne l'indiquent les sondages de Fillon, abîmé par « l'affaire ».
La droite national-populiste de Marine Le Pen.


Quatre blocs de tailles comparables, entre 20 et 25 % des voix. C'est ce qui explique que t'élection de mai 2017 soit la plus illisible qu'on ait connue. Et cela rend très aléatoire l'hypothèse d'une majorité parlementaire homogène, quel que soit le vainqueur de la présidentielle. C'est particulièrement vrai de marine Le Pen: on voit mal que le FN, sans alliés, puisse passer de 2 députés à 289. D'où les appels du pied à Guaino ou Dupont-Aignan. Jusqu'ici infructueux. gnan. Jusqu'ici infructueux.


Si le parti du président n'avait pas la majorité au Parlement, on entrerait alors dans le jeu des alliances. Donc des compromis programmatiques. Ce qui est plus ou moins la norme en Europe, où dix-neuf pays sur vingt-sept ont des gouvernements de coalition.
C'est là que les choses se corsent. Car entre les quatre forces en présence, les combinaisons possibles ne sont pas si nombreuses.
Une coalition de la droite et de l'extrême-droite? Quasi impensable, pour des raisons stratégiques et idéologiques. Cela ferait exploser Les Républicains. Une alliance de toutes les gauches, remake de la « gauche plurielle » de Jospin.

Difficile, au sortir des années Hollande.


Une majorité de « troisième force », rassemblant la droite de la gauche et la gauche de la droite? C'est le pari — implicite — de Macron. Une conséquence possible de la montée des extrêmes. Mais une configuration inédite, dont on ne peut dire si elle serait viable. Arrêtons là les spéculations. Nul ne sait sur quoi débouchera cette folle campagne — pas même les protagonistes qui prétendent écrire l'avenir à la première personne. Tout de même, on aimerait bien les entendre sur le sujet, et qu'ils nous donnent leur recette du quatre-quarts.