JustPaste.it


Keynes est de retour. Le prix de la relance

Keynes est de retour. L'OCDE a renouvelé ce lundi son appel à une relance budgétaire, les Etats-Unis y vont tout droit avec Trump et le Royaume-Uni s'y résout après le vote pro-Brexit. L'Union européenne en débat aussi plus vivement depuis que la Commission a recommandé aux Etats membres d'adopter des budgets expansionnistes pour 2017 à hauteur de 0,5 point de PIB. Mais la seule réponse concrète à ce stade est venue de Berlin : « Nein ! » Sur le principe, Bruxelles et l'OCDE ont raison de pousser ce levier, qui viendrait en relais des largesses monétaires de la BCE et des réformes structurelles (marché du travail, concurrence) inégalement appliquées, pour muscler une croissance trop molle. Mais l'objectif avancé paraît inatteignable en zone euro. Soit il est demandé à tous les Etats de l'UE de laisser leur déficit déraper de 0,5 point, y compris les mauvais élèves, ce qui reviendrait à annihiler le Pacte de stabilité. Soit les seuls bons élèves (essentiellement l'Allemagne et les Pays-Bas) devraient agir à hauteur d'au moins 2 points de PIB, ce qui apparaît irréaliste. L'Europe devrait plutôt avancer sur ce terrain via des programmes budgétaires supranationaux du type plan Juncker, projets de défense en commun, numérique, etc. La Commission en est évidemment la première convaincue, elle qui peine chaque année à faire accepter aux Etats de mettre la main à la poche pour financer le maigre budget commun de l'Union. Elle pourrait cependant profiter d'un vent porteur du côté des investisseurs, qui achètent actuellement, comme on le voit à Wall Street, l'idée de plans budgétaires ambitieux, même si cela aura pour corollaire une remontée des taux.

Mais les Etats européens ne sauraient oublier - Wolfgang Schäuble est là pour le rappeler - que cela implique aussi l'acceptation d'une surveillance renforcée de leurs finances et d'un partage de souveraineté accru pour se doter des outils adéquats. La relance budgétaire européenne a un prix politique. De même faut-il lire dans leur ensemble les préconisations de l'OCDE. Cette dernière indique ainsi que les investissements supplémentaires devraient être consacrés à des projets augmentant la croissance potentielle des pays, et non à un simple soutien à la consommation. Dans le cas de la France, l'Organisation prône non pas de nouvelles dépenses publiques, au vu du niveau record de celles-ci, mais la poursuite des baisses de charges des entreprises. Qui seraient d'autant plus soutenables que des réformes structurelles limitant le poids de la dépense sur le long terme (millefeuille territorial, retraites, etc.) seraient mises en oeuvre, et non pas de simples coups de rabot. La relance oui, mais pas n'importe comment.


Source: lesechos.fr Etienne Lefebvre